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Critique de Oliv


"Bohème", publié en un volume par Mnémos en 2008, puis en format poche deux ans plus tard, est à l'origine un cycle en deux courts tomes datant de 1997 ; au moment de cette première parution, Mathieu Gaborit avait à peine vingt-cinq ans et était plus rôliste qu'écrivain. Mieux vaut garder ces données en tête afin de ne pas être trop déstabilisé durant la lecture.

Le pedigree rôlistique de l'auteur saute aux yeux, il se sent pour ainsi dire à chaque page. En l'occurrence, cela suffit à résumer les principales qualités et les principaux défauts de "Bohème" : une imagination débordante, de multiples trouvailles, un univers aux potentialités immenses, des personnages vivants et bien campés... Mais une intrigue décousue, une narration erratique, une multiplication parfois artificielle de situations et de personnages, comme si l'auteur était submergé par le flot de ses idées (à l'image d'un MJ dépassé par des événements qu'il ne contrôle plus) au point de ne faire souvent que survoler ce qui nécessiterait un plus large développement. On notera que ces qualités sont surtout visibles dans la première partie, et ces défauts dans la seconde.

"Bohème" est donc composé de deux parties distinctes, reliées par un fil ténu : "Les Rives d'Antipolie", racontant la quête de Louise, fille d'activistes révolutionnaires, chargée de récupérer la cargaison d'un aérostat écrasé dans une zone reculée d'Europe Orientale, et "Revolutsya", rapportant le combat qui oppose, dans une Moscou imaginaire, les révolutionnaires à l'ordre établi, la "Propagande". L'univers, à mi-chemin de la SF et de la fantasy, est mis en place dans la première partie, et l'action pure prend le pas dans la seconde ; d'où le fait que "Les Rives d'Antipolie" soit bon, et "Revolutsya" beaucoup moins.

La fin du roman est à cet égard révélatrice : grand-guignolesque, faisant rappliquer en catastrophe une Louise oubliée dans les chapitres précédents, elle tombe à plat faute d'avoir été suffisamment bien préparée en amont... En dépit des bonnes idées qui la sous-tendent, notamment le pouvoir de l'imagination, accompagné d'un hommage, maladroit mais sincère, à la culture "populaire", aux "mauvais genres".

Ce roman n'est pas si vieux, pourtant on peut penser qu'au vu de l'évolution de la SFFF francophone ces dix ou quinze dernières années, il ne serait pas publié aujourd'hui : le lectorat a mûri, les auteurs ont pris du recul par rapport au jeu de rôle, il n'est plus possible de se reposer uniquement sur de bonnes idées et une imagination débridée. Si "Bohème" a été réédité récemment, il le doit sans doute davantage à la renommée acquise depuis par Mathieu Gaborit qu'à ses qualités propres. Ce n'est pas une mauvaise lecture, principalement grâce à une première partie d'une rare inventivité, mais ce roman reste malgré tout assez dispensable.
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