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Critique de Ambages


« Mais comment aurions-nous pu nous souvenir en détail de la chaine des petites morts parfumées qui avaient contribué à nous maintenir en vie ? »

Un roman qui se lit vite car il est non seulement court mais constitué de petits chapitres qui permettent au narrateur de nous faire partager ses songes à l'approche de la soixantaine, ses envies et ses peurs liées au sexe, à l'amour de la chair, à la fusion des corps. « Il n'existe pas de partage calme, serein des chairs dans l'extrême fornication. ». S'installe le doute avec l'âge, pourra-t-on aimer comme on aime ? le narrateur, un écrivain vivant ponctuellement dans les Landes, terre de repos pour le parisien qu'il est, nous fait partager son existence avec Françoise, sa régulière et une incroyable rencontre avec Doris, une jeune femme qui prend de l'ampleur dans son coeur. Alors qu'il raconte son présent, en pointillé il se replonge dans les souvenirs de ses rencontres féminines qui l'ont fait amant et amoureux tout au long de son existence. C'est plus qu'un roman érotique, ou alors c'est ce que j'aime dans la littérature érotique, le propos sert l'histoire et il y en a une très belle.

« Entre le désir d'être fessé et celui d'être confessé, il n'y a finalement qu'un con. »
C'est une écriture drôle, - « La sainteté sent le bouc, je vous le dis, suave luxure, pieuse dépravation, l'ange est si près du démon » - pleine d'humour et de recul par rapport à l'écriture. «Une scène érotique réussie est celle où la littérature s'efface et où le sexe même dirige la lecture (imaginer une queue à lunettes qui tourne les pages). »

Ce n'est pas anodin si le narrateur est un écrivain, et j'ai apprécié l'envers du décor, à savoir la construction artistique, sa « constitution mentale » : « c'est effarant, le pouvoir colonisateur d'une idée qui vient. Scribe dévoué et impuissant, il me faut assister à ce déferlement de soi. M'aura bouffée le cerveau ce soir, la nuée de sauterelles visionnaires. » Voilà la naissance d'une idée pour une pièce de théâtre qui fourmille dans la tête d'un auteur et je pense que cette description doit être proche de la création telle que la vit Max Genève.

L'auteur n'hésite pas à apostropher le lecteur mais rarement à le choquer (un passage cependant où je me suis dit qu'il avait un sacré culot pour l'écrire, j'étais pourtant prévenue « Nouvelle apostrophe au lecteur, je me dois ici de l'informer que la scène qui va suivre et à laquelle je ne m'attendais nullement [moi non plus] peut heurter sa sensibilité ou choquer ses convictions. On peut donc directement pousser au chapitre suivant. L'auteur, lui, est bien contraint de s'y coller : le souci de la vérité, de l'exactitude du détail ne lui laisse pas le choix. »).

Mention spéciale pour la couverture, magnifique, une pose révélant une peau soyeuse, des courbes qui font penser à un violon blanc mais un corps sans visage et des cheveux contraints dans un chignon bas renvoyant à la maturité de la chair. A croquer ! Pourquoi ai-je écrit cela ? « tendre manducation, tous les amoureux du monde, y compris les plus corsetés, savent que la frontière est ténue entre aimer et manger l'autre. »
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