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Critique de Daniel_Sandner


Retour de lecture sur "Le Livre des Nuits", un premier roman de Sylvie Germain, que je ne connaissais que vaguement de nom, publié en 1985. Pour la petite histoire, Sylvie Germain est l'auteure qui a créé une polémique lors du bac 2022, suite aux nombreuses réactions hostiles après qu'un extrait d'une autre de ses oeuvres, jugé trop difficile, ait été proposé en commentaire de texte aux épreuves de français. Cette polémique, comme elle l'a elle-même qualifiée, était juste absurde et affligeante, mais elle n'avait pas à se défendre, son écriture parle pour elle, celle-ci est juste exceptionnelle, très poétique et d'une très grande beauté. Pour revenir à ce livre, il démarre avec l'histoire d'un batelier, Honoré-Firmin Peniel, marié, ayant un fils et une fille, qui rentre de la guerre de 1870 complément défiguré par un coup de sabre. Sur un coup de folie il viole sa fille, et de cette union naîtra un fils:  Victor-Flandrin qui sera le personnage central de ce roman. Il ne connaîtra jamais sa mère qui mourra en le mettant au monde. Alors qu'une nouvelle guerre se prépare, le père, traumatisé par sa propre expérience, coupera deux doigts à son fils pour l'empêcher d'être mobilisé. Après le suicide de son père, Victor-Flandrin prendra la route pour s'installer au hasard, dans les terre, où il développera sa ferme, aura quatres femmes et de chacune d'elles des jumeaux qui auront des fortunes diverses. On suivra au cours de cette histoire cette famille Peniel, qui traversera trois grandes guerres et une succession de malheurs qui en découleront souvent. Comme déjà évoqué plus haut, ce qui frappe en premier, est la qualité de l'écriture, qui est une véritable merveille, envoûtante, quelquefois lyrique et très poétique. Ce roman est à la fois un roman historique puisqu'il traite de ces trois guerres qui se sont succédé, mais également un conte fantastique, on navigue continuellement entre le réel et le fantastique. L'histoire du livre, liée à la grande histoire qui n'est qu'un éternel recommencement, tourne forcément un peu à la répétition. Cela est notamment le cas avec l'enchaînement des mariages et surtout des naissances qui sont au nombre de quinze, rien que pour Victor-Flandrin, mais chaque fois qu'on commence à se lasser et qu'on se demande où l'auteure veut en venir, le livre bascule dans des épisodes magnifiques, très émouvants et très prenants. Les passages relatant la traversée des deux guerres mondiales sont particulièrement lyriques et poignants. C'est un livre très noir tout en étant incroyablement poétique. Sylvain Germain nous raconte cette succession de guerre à travers la saga de cette famille qui connaîtra un enchaînement de malheurs sans fin mais qui à chaque fois se relèvera tant  bien que mal. C'est un conte cruel dans lequel la beauté de la langue contraste avec l'horreur du vécu. Une écriture qui, à travers sa poésie, nous rappelle que malgré tout, même au plus profond de la nuit, la vie est plus forte que tout, qu'il y a toujours de l'espoir. Pour finir, c'est un livre bouleversant et émouvant, qui vous hantera longtemps. Un livre à lire absolument pour découvrir cette écriture magnifique et l'univers, entre récit historique et conte fantastique, de cette auteure incontournable.

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"Sa mémoire était longue et profonde, – il n'était pas un seul de ces milliers de jours qui bâtissaient sa vie dont il ne gardât un souvenir aigu. Nombre de ces jours lui avaient été souffrance et deuils, mais Ruth jetait une clarté si vive, une joie si forte, sur le présent que tout le passé en était rédimé. Loin même de lui faire oublier celles qu'il avait aimé autrefois, la présence de Ruth clarifiait leurs visages pour les fixer, non en portraits, mais en paysages illimités."
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