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Critique de VABO1


"tumeur ou tutu". Quel livre étonnant et même détonnant ! Lu dans le cadre du prix première paroles 2024, ce premier livre de Léna Ghar est extrêmement dense et nous immerge dans une création linguistique, originale, déstabilisante, puissante, parfois irritante mais qui ne peut laisser indifférent. La construction en très courts chapitres crée aussi une tension, une urgence chez le lecteur.

L'entourage familial est présenté avec des surnoms évocateurs : Grandoux, le demi-frère protecteur mais de plus en plus absent,  Petit prince le plus jeune frère, maltraité, Swayze le père fragile et Novatchok, la mère qui "n'arrive pas toujours à l'aimer gentiment". Je l'ai aussitôt associé à novitchok, le poisson mortel, qui fait de graves dégâts et provoque des douleurs épouvantables...comme cette mère dysfonctionnelle. Je, la narratrice vit dans une "praison" et côtoient à l'extérieur les "paladiens et les spartiates ". Elle  recherche désespérément son identité.

Les oxymores et  l'invention d'un vocabulaire  par association de mots aux sonorités et sens évocateurs comme "amniosie"   "polentasse"     "cloatre" "l'intimmensité", "l'immanité" ... tout cela crée un univers particulier, déstabilisant qui exprime bien l'enfermement et l'angoisse ressentis par la narratrice.

J'ai relevé quelques paroles de chansons "prouves que tu existe", " à faire trembler les murs de Jéricho ", " elle me  dit que je suis belle" "fais comme l'oiseau" comme des rengaines qui s'insinuent dans la tête sans y penser.  le recours aux mathématiques pour trouver une logique à son raisonnement est compliqué à suivre mais se tient. Dans un esprit autant fragilisé les étais viennent parfois de mécanismes rigides rassurants. 
Certains ont souligné un sens caché du titre a lire aussi comme  "tu meurs ou tu tue". C'est aussi la tumeur qui grandit dans la tête de la narratrice, faite de la violence subie et emmagasinée pendant des années qui altère sa perception ou l'aiguise à l'extrême. 
Ses Tocs, ses obsessions, ses troubles comportementaux traduisent ce mal-être, ce trou béant qui l'obsède, pas celui du canapé jaune, mais celui qu'elle à au fond de ses tripes. On suit la narratrice devenue jeune adulte dans ses errements, sa destruction avec l'alcool, ses relations sociales et amoureuses chaotiques et la violence inouïe qui monte en elle comme un raz de marée. 
De ses 3 ans à ses 27 ans elle recherche désespérément ce mot qui la constitue et lui fait défaut. La pièce manquante d'un puzzle éparpillé, qui lui donnera cohésion et la fera tenir debout. Un anagramme nous donnera la clé.  Malgré tout, comprendre que "je", est un être sain, lui permettra de se dissocier de sa mère toxique.
Pour se sauver de la Monstre qui l'habite, la narratrice devra symboliquement tuer la mère, l'ogre. "si je continue à me taire je meurs mais si je parle je la tue".
Un livre qui mériterait d' être relu pour en comprendre toutes les subtilités mais pour autant sa densité rebute un peu.

 




 

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