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Critique de StCyr


Le voyage au Congo suivi du Retour du Tchad - sous-titrés carnets de route - constituent la relation du voyage que firent André Gide et son compagnon Marc Allégret, en Afrique Equatoriale Française, de juillet 1926 à mai 1927.
Gide se fait le témoin objectif de la vie des populations autochtones sous le régime colonial; il constate le pouvoir exorbitant qu'y exerce une compagnie d'exploitation forestière. Non content de piller les ressources naturelles, on gruge les indigènes sur la paye, le ravitaillement, le pesage des récoltes. A cette main d'oeuvre corvéable à merci, réquisitionnable et exploitable ad libitum, on refuse les soins minimums, la nourriture indispensable; on favorise ainsi la propagation de la maladie du sommeil chez une population déjà durement éprouvée par les conditions d'existences particulières sous ces latitudes et leur kyrielle de maladies tropicales : éléphantiasis, pian.... On est encore plus horrifié par les exactions perpétrées sur les individus récalcitrants, par les séides de la compagnie, sous le regard indifférent des autorités dépassées. Gide est ainsi le porte parole d'une population qui n'a pas voix au chapitre, sacrifiée sur l'autel du “progrès” et de la “civilisation”. Mais l'oeuvre manquerait d'actualité et d'intérêt si elle n'était qu'un brûlot contre le colonialisme. Mais c'est avant tout un journal; Gide y fait oeuvre d'antropologue en décrivant la vie des tribus qu'il rencontre: il s'émerveille de la propreté des massa, du côté industrieux et net de leur existence; il s'enthousiasme de l'aptitude au chant des saras et s'étonne de la mutilation que subissent avec leur propres consentement les femmes à plateau. Chez les populations des villages non encore atteintes par l'esprit des villes il rencontre toujours gentillesse, simplicité, confiance, enthousiasme et parfois même affection. Passionnantes sont ses descriptions d'anthomologiste amateur, notamment concernant la remarquable mouche maçonne. On est pris d'affection pour Didinki, le paresseux affectueux et gourmand, on s'amuse de la narration homérique du dépeçage d'un hippopotame. Et puis, sous le voyageur curieux affleure toujours le grand écrivain qui, lorsque Marc Allégret piste le gibier ou par à la chasse aux images, s'adonne à la lecture de Milton, de Goethe, de Corneille, de Racine, de la Fontaine ou de Conrad et nous fait partager ses impressions avec perspicacité. Le tout est servi par une langue d'une belle limpidité, d'une clarté rehaussée par quelques vocables précieux et surannés qui ne nuisent nullement au plaisir de la lecture.
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