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Critique de Gwen21


Difficile d'imaginer que c'est dix ans avant la parution des sulfureuses et machiavéliques "Liaisons dangereuses" De Laclos que paraît en Allemagne ce roman, sans doute le plus connu de Goethe.

Les deux oeuvres épistolaires, toutes deux considérées à juste titre comme des chefs d'oeuvres de la littérature classique, sont pourtant diamétralement opposées dans leur ton. A lire "Les souffrances du jeune Werther" qui amorce le courant romantique, le lecteur doit faire effort pour se rappeler que le récit a pour décor le XVIIIème siècle, et non le XIXème siècle, tant sera développée par la suite à travers toute l'Europe cette thématique de l'amour impossible et du drame qui en découle.

Les dramaturges antiques, les trouvères du Moyen-Age, Shakespeare, Racine et quelques autres à l'époque Moderne ont également déposé leur talent aux pieds de la tragédie amoureuse mais Goethe a résolument bousculé les codes dont les auteurs de son temps étaient les héritiers. Ici, point de seigneurs, de princes, de nobles familles, ni de rois. Ici, un simple jeune homme, Werther, que rien, a priori, ne destinait à une passion aussi vive et à une fin aussi funeste. Ici, une jeune femme, Charlotte, charmante et bienveillante, qui veille sur ses frères et soeurs et épouse l'homme à qui on l'a promise. Ici, point de palais et de villes corruptrices, mais la campagne dans tout l'éclat de sa simplicité. Ici, une frondaison de tilleuls, une haie de noyers, une claire fontaine et un déjeuner sur l'herbe. Cependant, aucune mièvrerie.

Il incombe au lecteur de faire fi de ce qui, dans ce décor, pourrait lui sembler familier, et de se rappeler que c'est l'une des toutes premières fois que ce décor fut planté dans un roman. Il en savoure alors toute la fraîcheur et le lyrisme.

Le roman est très intelligemment construit en deux temps : la correspondance de Werther à un ami qui lui permet de rapporter la genèse de sa rencontre avec Charlotte ainsi que l'évolution de ses sentiments pour la jeune femme ; puis le récit de "l'éditeur", procédé qui permet à Goethe de décrire la fin de son héros dans une incroyable ascension dramatique qui fait, selon moi, la vraie beauté du roman, et toute sa grandeur.

"Les souffrances du jeune Werther" fit grande sensation à sa parution en raison du suicide de son héros qui constitue l'une des clés du courant romantique. Ici, point de malentendu menant à la mort comme dans "Roméo et Juliette" ou de héros tombé sous le coup de l'arme ou de la maladie, mais un héros qui quitte en tout discernement le drame où il s'est enlisé. Un coup de maître, et qui aura peut-être inspiré Laclos pour choisir la mort de son vicomte de Valmont.


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