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Critique de Nastie92


« Derrière chaque grand homme, il y a une femme. » dit le dicton, dont le couple Gödel est une illustration parfaite.
Kurt Gödel était un mathématicien et logicien autrichien. L'un des plus grands du vingtième siècle.
Un génie à qui l'on doit des travaux d'une importance scientifique capitale.
Un génie tourmenté, un génie fragile. Physiquement et psychologiquement.
Mais derrière Kurt, il y avait Adèle.
Adèle qui n'a pu empêcher Kurt de sombrer, de se noyer dans ses névroses, mais qui a sans cesse lutté pour ralentir la chute.
Kurt n'a pas eu la vie facile, Adèle non plus.
Vivre dans l'ombre d'un être torturé, tout en jouant le rôle de l'indispensable tuteur qui lui permet de rester debout. Et sans rien attendre en retour : Kurt aimait Adèle, mais à sa façon, comme peut aimer quelqu'un qui vit dans un monde parallèle.
Arrivée au bout de son parcours, Adèle tire un bilan sans concession de sa vie de couple, et l'auteur lui fait dire ces mots cruellement lucides : « C'était bien lui qui m'avait usée, lui qui s'était servi de moi comme d'une batterie d'appoint. »
Yannick Grannec m'a enthousiasmée avec son livre remarquablement documenté et très bien construit.
C'est une double biographie à cheval sur deux époques : la jeunesse et la vieillesse d'Adèle.
L'auteur y réussit le tour de force d'aborder une multitude de sujets et d'aspects sans que jamais rien ne soit confus, ne soit lourd ou superflu.
Sciences, philosophie et histoire s'imbriquent parfaitement.
Imaginez un peu la vie à Princeton à partir de la fin de la seconde guerre mondiale.
Princeton, cette faculté américaine qui concentre tous les cerveaux de l'époque, dont beaucoup ont fui la guerre et l'Allemagne nazie.
Princeton, intellectuellement bouillonnante.
On y croise des prix Nobel et des récipiendaires de la Médaille Fields à chaque coin de rue ou presque.
Gödel, Oppenheimer, Einstein et bien d'autres : avec de tels convives un dîner tout à fait informel se transforme en un passionnant débat d'idées, en un échange scientifique, mais aussi philosophique sur les différentes façons de concevoir la science et de voir le monde.
Yannick Grannec nous invite à ces soirées et nous offre une place de choix pour suivre toutes les conversations.
N'ayez crainte : nul besoin d'être un as des mathématiques pour apprécier, l'auteur met plus en avant l'enchaînement des pensées que le contenu scientifique proprement dit. De plus, le texte est agrémenté de nombreuses notes explicatives très claires. Là encore, chapeau bas devant la qualité du travail documentaire accompli !
Si vous n'êtes pas vous-mêmes scientifiques, vous vous imaginez peut-être que les mathématiciens, physiciens et autres logiciens sont de purs esprits, vivant à demeure dans leur monde abstrait. La déesses des petites victoires vous fera comprendre qu'il n'en est rien et que derrière une façade de grands chercheurs se cachent des êtres humains, avec leurs failles et leurs faiblesses, comme tout un chacun.
Yannick Grannec nous parle de sciences, d'histoire, de politique et de philosophie, mais en définitive, c'est d'humain qu'il s'agit, et c'est pour cette raison que son texte nous touche autant.
Cerise sur le gâteau : de l'humour, justement dosé, complète parfaitement ce merveilleux mélange.
Un immense plaisir de lecture, un livre que je ne peux que recommander.
Venez découvrir à votre tour les petites victoires d'Adèle, venez rencontrer Kurt, dont Einstein disait : « Je ne vais à mon bureau que pour avoir le privilège de rentrer à pied avec Kurt Gödel. »
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