De temps en temps dans une vie de lecteur, on prend un coup derrière la tête. Un livre vous chamboule, vous bouleverse, vous fait croire en la vie, au talent, à la beauté, au combat, à l'amour, vous fait donc avancer, progresser, vous rend plus fort, plein d'espérance voire vous ouvre les yeux, vous offre un angle de vue nouveau. D' "Une vie" De Maupassant à dernièrement " Sérotonine" de Michel Houellebecq, la littérature sait faire résonner des sentiments forts en vous. Et soudain, tombe dans ma vie la dernière parution de l'une de nos auteures à gros tirage de notre territoire : Virginie Grimaldi. Ma vision du livre, de la librairie, de la lecture s'en trouve transformée. La reine ( dixit l'éditeur, une certaine presse) de l'émotion, de la tendresse, de la bienveillance a frappé mon coeur de lecteur et a su ouvrir dans ma tête des abîmes de réflexion. J'ai été pris d'un vertige existentiel comme rarement en lisant un roman. Oui, comment ne pas être pris de vertige devant le vide abyssal, le néant littéraire que représente ce roman ?
Je rassure mes lecteurs, je n'ai pas participé à l'enrichissement de la maison Fayard, on m'a prêté ce tas de pages. N'empêche... la lecture fut un vrai calvaire. Chaque page pèse une tonne à tourner. Certes il y a une intrigue qui voit des octogénaires se battre pour ne pas être expulsés de leur maison parce qu'une municipalité méchante, veut construire une nouvelle école. Mais, que dire, à part ce résumé ? Il n'y a rien de plus. Pas de décor, juste la maison du couple principal qui se résume par une description fouillée : une façade avec sa porte encadrée de deux fenêtres. On me dira que Mme Grimaldi donne dans le minimalisme ( c'est moderne et tendance) et c'est vrai ! Elle a limité la psychologie de chaque personnage par un vague cliché ( la bougon, la coquette, ...) ainsi que leur physionomie à une paire de lunettes pour l'une, un fauteuil roulant pour un autre. Elle a appauvri les dialogues au maximum tout en glissant des blagounettes d'une inanité qui laisse pantois.
Cependant, on voit derrière ...enfin non pas derrière puisqu'il n'y a rien...on voit que les caractères imprimés cherchaient à nous attendrir sur la vie simple d'un couple lambda, avec ses joies, ses peines, ses bonheurs,ses malheurs... Seulement, la bonne volonté ne suffit pas ! Quand la platitude se met en couple avec l'indigence d'une écriture très scolaire, le résultat relève de l'arnaque.
Oui mais ça marche ! Et c'est là, où l'on prend un coup sur la tête ! Comme est-ce possible ? le nivellement par le bas de notre société libérale est-il en train de gagner ? J'en ai bien peur. A force d'abrutissement généralisé grâce à cette kyrielle d'écrans visant la détente la plus facile et la plus régressive, grâce aussi à une école qui ne cherche plus qu'une pseudo réussite sociale au détriment d'une petite accession à la vraie culture, on en est à célébrer et faire acheter ( et aussi aimer) des oeuvres produits indigents. C'est terrifiant ! Ca l'est d'autant plus lorsque l'on se plonge dans les pages de remerciements de l'auteure en fin d'ouvrage où un nombre incalculable de personnes s'est penché sur la naissance de cette chose, qui ont ( paraît-il) beaucoup ri, énormément pleuré ( même l'éditrice, Sophie de Closets...enfin elle, elle a du beaucoup rire en pensant à son chiffre d'affaire), on reste abasourdi.
On peut m'accuser de faire un peu d'élitisme, mon snob,... que sais-je ? Mais franchement, il existe tout de même en librairie, de la feel-good littérature, bien écrite, originale, facile à lire et dont on n'a pas à rougir, loin de là. Des exemples pour ces lecteurs-trices de Virginie Grimaldi ? Lisez, par exemple " Changer le sens des rivières" de Murielle Magellan, "Le mari de la harpiste" de Laurent Bénégui ou "L'enfer est pavé de bonnes intentions" de Lauren Weisberger, et vous verrez la différence. Réel plaisir de lecture ( qui peut vider la tête comme on aime dire en ce moment), sens du rythme, personnages forts qui existent vraiment, intrigue plus fouillée.
Pour Virginie Grimaldi, seul le titre est pas mal, le reste, c'est rien.
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