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Critique de Henri-l-oiseleur


"La politique de la Terreur" est un ouvrage absolument remarquable, un des meilleurs livres d'histoire que je connaisse sur la Révolution française et sans doute, sur les révolutions en général. Ce n'est pas un récit des événements, mais un essai approfondi sur la notion de terreur, ses tenants et aboutissants politiques, et sur la pensée - théorique, politique et religieuse - de sa figure principale Robespierre. La figure de Marat est aussi étudiée en début de volume, ainsi que le groupe des Jacobins et le jacobinisme en tant que doctrine et stratégie. Il faut ajouter que la profondeur de l'analyse et les notions mises en jeu rendent ardue la lecture de ce livre, mais on en sort enrichi et mieux instruit.

Sachant que la Terreur est l'usage de la violence sur un groupe donné, afin de maintenir les spectateurs dans la crainte et l'obéissance, on assiste en fait à un jeu à trois, presque théâtral : le terroriste, ses victimes et le public. Cela explique la grande importance que revêt dans cet essai la figure de Marat, qui était avant tout un journaliste : même en ces temps-là, où l'opinion publique ne fait que naître, avec elle apparaissent ceux qui la manipulent, à savoir les journalistes. On n'insistera jamais assez sur le lien essentiel entre le journaliste et la terreur : sans lui, elle est quasi inopérante, et lui seul est à même de lui donner tout l'écho et toute l'efficacité nécessaires. On ne saurait être plus actuel.

Patrice Gueniffey décrit avec soin les aspects juridiques, politiques et institutionnels de la Terreur, pendant les années 1789-1792. C'est la partie la plus ardue du volume, où la simple démarche juridique ne suffit pas, puisque on voit clairement que le droit et les principes ne sont que l'habillage de rapports de force : droit et politique s'affrontent et s'entremêlent. L'auteur discute aussi point par point les thèses et les explications des historiens communistes du XX°s, qui étaient forcément intéressés par le phénomène terroriste. Mais il s'appuie aussi sur les ouvrages du XIX°s, où un grand effort fut fait pour comprendre les événements révolutionnaires.

Le dernier tiers du volume étudie la Vendée et la Terreur proprement dite, jusqu'à la chute de Robespierre. Les colonnes infernales du général Turreau, les meurtres judiciaires avant et après la loi du 22 prairial, permettent d'interroger la façon dont on concevait l'homme, le citoyen, la loi, et pour ce qui est de Robespierre, la vertu, en ces temps extrêmes. L'analyse des écrits de Robespierre est serrée et éclaire les aspects idéologiques du meurtre de masse.

"La politique de la Terreur" est un livre à relire et à étudier avec soin : une seule lecture ne suffit pas, tant ses enseignements sont profonds et précieux.
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