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Critique de CorinneCo


Quand un conflit semble tirer en longueur, qu'aucune solution quelle qu'elle soit ne pointe à l'horizon ne serait-ce qu'en ébauche, certains peuvent penser à une guerre éternelle.
Joe Haldeman sous une plume caustique donne la parole à William Mandella, soldat somme toute éminemment pacifique, dupe de rien et un tantinet fataliste, mais combatif. On finit par se dire qu'il ne sortira jamais de cette guerre, que les tentatives pour partir du « circuit » de l'armée sont quasiment nulles. Promu à un grade supérieur au fil des années sans qu'il ne demande rien, comme un piège supplémentaire à sa condition, Mandella trompé par l'étirement temporel spatial ronge son frein dans un conflit avec les Taurans, aliens énigmatiques, ennemis à abattre coûte que coûte.
William Mandella, a des états de service tout à fait honorables (ce qui prouve son efficacité martiale lui qui est à la base un scientifique), et ne perd jamais son ton sarcastique, ironique et distancié qui semble le protéger d'un environnement oppressant que ce soit à l'intérieur qu'à l'extérieur des vaisseaux guerriers. Les techniques de guerre, les armes de guerre sont décrites avec minutie, dans son esprit ce n'est pas une fascination guerrière plutôt une forme d'aberration mentale et sa façon de s'en moquer parfois un talisman.
La hiérarchie militaire est vue comme une entité manipulatrice qui s'alimente en conflit pour justifier son existence. Par certains aspects, le monde terrestre perçu à travers la plume d'Haldeman au fil des siècles ressemble à une gigantesque secte. Qui a envie de vivre dans une gigantesque secte ? C'est à la fois repoussant et grotesque. Les villes m'ont fait penser à d'énormes centres commerciaux avec escaliers roulants et escaliers mécaniques. A la fois burlesque et flippant. Quand Mandella revient sur terre la première fois avec sa petite amie Marygay, ils découvrent un monde quasiment uniformisé ou tout semble aller pour le mieux. Il suffit d'un détail au bord d'un lac (si je me souviens bien) pour que le doute et la peur s'installe. Mais impossible de s'échapper à moins de rempiler. Haldeman au retour de la guerre du Vietnam a du trouver les Etats-Unis bien changés ; l'esprit contestataire était passé par là. Est-ce que pour Joe Haldeman ce fut comme un saut dans le temps ? Une distorsion temporelle qui l'avait transporté dans un autre monde ?
Quand Mandella revient sur Terre à sa dernière mission c'est pour apprendre que la guerre est terminée depuis …. Deux cent ans ! de quoi vous filer un gros coup de bourdon ! Ce qui est fantastique avec Haldeman, c'est l'efficacité de l'administration terrienne dans son histoire ! Les dossiers des soldats ne se perdent jamais et sont toujours remis au retour de ceux-ci. Même si 100 ou 200 ans sont passés.
En fait, William Mandella n'aspire qu'à une chose, rejoindre, si c'est possible Marygay et vivre avec elle dans un monde pacifié et non formaté.
Quand Mandella découvre que le seul ami qu'il s'est fait à bord de son vaisseau spatial est un humanoïde, il a une réaction amusée et fatalement blasée. Genre, « ça va avec le reste, alors à quoi bon…. ». La solution de la surpopulation dans ce livre est assez savoureuse ; simple et évidente : tout le monde est homosexuel et l'hétérosexualité est une déviance. Mandella hétéro confirmé se voit diplomatiquement expliqué que pour le bien de tout le monde il ferait bien de virer sa cuti. C'est assez drôle, lui-même trouve cela à la fois gênant et « folklorique ». Mais il ne cède pas. A son retour définitif on voit que la radicalité en matière d'espèce humaine s'est accentuée. Un seul homme et une seule femme clonés à l'infini et reproduit avec parcimonie. Seule demeure une planète où subsiste – comme un zoo en fait – des humains hommes et femmes qui vivent, procréent comme « avant ».
Willliam Mandella est un personnage sympathique. Il a compris que ses marches de manoeuvre sont étroites et décide néanmoins de s'en sortir absolument. Comme si dans son for intérieur il se disait « ils ne m'auront pas « ni le pouvoir militaire, ni ce monde qui lui est devenu complètement étranger, ni les aliens. Il a encore l'intégrité de sa conscience et il veut la garder. Moins puissante que l'écriture de Ben Bova, celle de Joe Haldeman est toutefois attractive. Suffisamment pour avoir envie de lire La paix éternelle.

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