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Critique de Pavlik


Pavlik
27 décembre 2015
S'il ne fallait retenir qu'un ouvrage du sous-genre "sf militaire" (à supposer que cette nomenclature ait un sens), ce serait peut-être celui-ci...

Joe Haldeman s'inspire directement de son expérience de soldat au Viet-Nam pour écrire ce fantastique roman. Précisons d'emblée que son intention n'était pas d'écrire un brûlot contre l'armée. Ainsi, comme il le dit lui-même, "La Guerre Éternelle est beaucoup plus un ouvrage dénonçant la guerre qu'un roman antimilitariste. Je suis contre la guerre, pas contre les soldats. Bien sûr, j'ai pu être dur pour une classe particulière de militaires, les officiers. Personne ne s'en est jamais plaint."
La cible de l'auteur est donc bien la hiérarchie militaire et le fonctionnement de l'armée qui conditionnent les hommes pour qu'ils deviennent des machines à tuer...C'est aussi une histoire qui peut s'envisager à travers le thème du contact.

Le titre n'est pas à prendre au pied de la lettre mais le conflit mis en scène dure quand même la bagatelle de 1146 ans (de 1997 à 3143). Il oppose les hommes aux Taurans, une race extraterrestre qui semble détruire de nombreux vaisseaux humains. Dans ce futur décrit par Haldeman (ou plutôt ces futurs), l'humanité maîtrise la technologie du "saut collapsar" qui utilise le phénomène des trous de ver pour accélérer les voyages interstellaires. Aux abords de chaque collapsar est aménagée une planète-portail qui en garde l'accès stratégique. Les vaisseaux spatiaux voyagent à des vitesses proches de la lumière et subissent des accélérations énormes, ce qui oblige les humains à s'installer dans des cocons de protection, en état de biostase. Pendant ce temps, un ordinateur logistique prend en charge la navigation du vaisseau. On suit le parcours de William Mandella, incorporé comme simple soldat, et qui, batailles après batailles, gravit les échelons hiérarchiques (ainsi, le roman est divisé en 4 parties : soldat Mandella, sergent-chef, lieutenant et commandant...)

Selon moi les trois points forts du récit sont :

-le personnage principal, une sorte de pacifiste au pays des straship troopers, prétexte, pour l'auteur, à développer un style corrosif, plein d'humour mais néanmoins fondamentalement pessimiste, dont la cible principale est l'armée.

-la double temporalité de l'histoire : le fait de faire des sauts répétés ralentit le vieillissement du héros qui, à la fin de la guerre, n'aura que 32 ans. Il est ainsi très savoureux, mais aussi, d'une certaine manière, très triste, de constater à quel point Mandella arrive de moins en moins à trouver sa place dans la société, lors de ses permissions. En effet, si pour lui quelques semaines ce sont écoulées, ce sont plusieurs siècles qui ont défilé dans le "monde réel". Ainsi, plus le temps passe, moins les soldats sont à même de pouvoir le réintégrer...Cette astuce scénaristique permet donc à Haldeman (en plus de pouvoir nous présenter, comme je le disais, non pas un mais des futurs), de mettre en avant l'irréalité et l'injustice de la condition de soldat et l'hypocrisie d'une société incapable de faire une place à ceux qui meurent pour elles...

-l'évocation d'une histoire d'amour crédible, ce qui est plutôt rare en général dans les oeuvres de sf, celle de Mandella et de Marygay Potter, officier relevé de ses fonctions pour avoir suggéré d'épargner l'ennemi, lors d'un engagement.

Une histoire forte, un style emprunt d'une vrai personnalité, un thème universel...Un roman incontournable pour qui aime la sf (et les autres). Dans l'esprit, il est un peu à la guerre du Viet-Nam ce "qu'Abattoir 5" est à la seconde guerre mondiale. Quant au motif qui déclencha les hostilités, il n'est révélé qu'à la fin et souligne, de façon magistral, l'absurdité même de la guerre.

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