AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Arakasi


A seize ans, Kounta Kinté est fier d'appartenir à la tribu des Mandingues d'Afrique Occidentale, fier d'être le fils du courageux Omoro et de la belle Binta, fier d'être le descendant d'une longue lignée de voyageurs et de guerriers remontant jusqu'au temps du Prophète. Jamais il n'a douté de sa destinée : devenir un homme respecté, se marier, avoir de nombreux petits garçons et apporter gloire et prospérité à son petit village natal, Djouffouré. Mais une terrible nuit de l'année 1766, la fatalité va réduire tous ses espoirs en cendres. Alors que Kounta marchait dans la forêt pour aller tailler un tambour à son petit frère Lamine, il se fait capturer par une tribu ennemie et vendre à un équipage de « toubabs », ces diables blancs venus d'au-delà des mers pour y faire commerce de vies humaines. Brutalisé, fouetté, affamé, Kounta est ensuite jeté au fond de la cale d'un navire avec cent cinquante autres malheureux captifs. Après plusieurs semaines de voyage terrifiant dans l'obscurité et l'odeur infecte des déjections, il reverra enfin la lumière du jour, mais ce sera pour découvrir un monde complètement différent de tout ce qu'il a pu connaître auparavant.

Kounta ne sera jamais un guerrier comme son père, ni un grand voyageur comme ses oncles, il ne verra jamais le Mali, Tombouctou et tous les lieux qu'il avait maintes fois visités en rêve. Esclave dans une vaste plantation de Virginie aux Etats-Unis, il parviendra à fonder une famille, mais ses enfants naitront dans les fers et ne connaitront jamais les merveilleuses forêts et les larges fleuves de la Gambie. Pourtant, décennie après décennie, Kounta saura conserver au fond de son coeur un peu de sa fierté d'antan et un désir ardent d'indépendance qu'il parviendra à transmettre à sa descendance. Enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants, tous se rappelleront qu'ils eurent un ancêtre nommé Kounta Kinté, fils d'Omoro Kinté et de Binta Kinté, que cet homme naquit libre et qu'il ne cessa jamais de l'être totalement. Jusqu'à que, deux siècles plus tard, l'arrière-arrière-arrière-arrière-petit-fils de Kounta « L'Africain », Alex Hauley, journaliste et écrivain américain reconnu, ne prenne la plume pour retracer la douloureuse histoire de sa famille.

Boudoudiou… C'est qu'il était sacrément éprouvant à lire, ce bouquin ! Je serai bien incapable de compter le nombre où j'ai dû temporairement interrompre ma lecture, le temps de ravaler la grosse boule d'émotion qui m'encombrait la gorge. Ecrit dans une langue simple mais terriblement efficace, « Racines » est un magnifique roman historique comme on voudrait en lire plus souvent, un très touchant pèlerinage au coeur d'un des pans les plus noirs de l'Histoire de l'Etats-Unis. C'est également le type de récit qui nous pousse à réfléchir sur nos propres racines et leurs liens avec notre mémoire nationale. En effet, au-delà des évidentes qualités littéraires du roman, comment ne pas être remué par l'ardeur, la passion et le long travail d'investigation d'Alex Hauley pour remonter le fil de ses origines familiales et faire ressurgir ainsi du néant les spectres de milliers d'autres familles très semblables, sacrifiées elles aussi sur l'autel de l'esclavage ?

Dans un monde où l'Histoire est généralement écrite par les vainqueurs, « Racines » nous rappelle que, parfois, la littérature permet aux vaincus de prendre leur revanche. Un chef d'oeuvre assurément.

Commenter  J’apprécie          1094



Ont apprécié cette critique (66)voir plus




{* *}