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Critique de christianebrody


Voilà une longue et riche saga qui pourrait avoir pour sous-titre « Quand le space-opera rencontre le fantôme de l'Opera ». L'Aube de la Nuit est un roman de science-fiction type hard-science : un roman d'anticipation basé sur les règles des sciences physiques actuelles et spéculant sur leur évolution et notre futur.

L'originalité ici, est de faire s'ouvrir le monde de la SF et la description d'une humanité améliorée, aux nombreuses factions toujours vaguement en conflit, organisée autour d'une Confédération large de milliards d'habitants et s'étendant sur des dizaines d'années-lumières, vers le fantastique : les morts reviennent à la vie pour posséder les vivants. Leur force et leur nombre menace de renverser la Confédération toute entière, dont la merveilleuse technologie est inefficace contre cette menace de l'au-delà, et les conflits qui naitront de cette lutte révèleront de singuliers héros.

Bien sûr, le fantastique d'une époque n'est jamais que la science d'une autre, et le tour de force du roman est de finir par prêter une existence tangible, raisonnable à l'au-delà en le dotant de règles entropiques, refusant toute déïté autrement que comme produit de l'évolution et de la sophistication.

Au cours de ses nombreuses pages, l'Aube de la Nuit développe paisiblement une forme de réflexion philosophique et sociale, utilisant la capacité de son récit à se faire juxtaposer de nombreuses cultures humaines organisées selon des critères sociaux très différents, structurés par un élément de leur passé commun : l'exode terrestre causé par la surpopulation et les dérèglements climatiques. Peter F. Hamilton a franchement su créer un univers cohérent, complexe, plausible, souvent amusant qui prête corps à son histoire. C'est un sacré travail, fruit de plusieurs années de labeur, dont la magie intrinsèque devient invisible : on pourrait penser au monde de Star Wars (pour le côté fun), au Cycle de Dune de Frank Herbert (pour le volet politique et martial), et au Cycle des Inhibiteurs d'Alastair Reynolds (pour la vision futuriste d'un monde technoïde et divisé).

Un petit mot pour ceux qui envisageraient d'acheter ces livres, il est bon de préciser un premier point : ne demandez pas au libraire l'aube de la nuit, car il ne le trouverait pas d'emblée : le titre du livre n'apparait nulle part sur la couverture. L'éditeur a subdivisé chacun des trois tomes originaux – ce qui est son droit éminent – mais je regrette qu'il n'ai pas précisé quelque part dans quel ordre les acheter. C'est commercialement peu opportun, et je me charge de rectifier :

L'Aube de la Nuit (titre de la série)
Rupture dans le Réel (titre du livre)
Génèse (tome I)
Emergence (tome II)
Expansion (tome III)
l'Alchimiste du Neutronium (titre du livre)
Consolidation (tome I)
Conflit (tome II)
le Dieu Nu (titre du livre)
Résistance (tome I)
Révélation (tome II)

Ce qui nous fait 10 millions de signes, 6000 pages en édition de poche – parait-il le plus long bouquin de SF du monde.

Il faut reconnaître que Peter F. Hamilton n'est pas avare de descriptions. L'histoire nous fait naviguer dans plusieurs dizaines de lieux : planètes colonisées, habitats, astéroïdes, mondes xénos, vaisseaux et plates-formes orbitales, sans compter toutes les merveilles astronomiques des voyages interstellaires ; tous ces paysages sont minutieusement détaillés, complétés, expliqués et interagissent les uns avec les autres, construisant peu à peu une très vaste image mentale complexe, complète, et très immersive.

Un peu repoussé au début par la masse de papier, ensuite agacé par la lenteur relative du premier tome (dont la fonction principale est de nous introduire aux protagonistes importants), j'ai finalement été conquis par le rythme du découpage du récit, la multiplicité des points de vues, l'inventivité des situations et des rebondissements, entrecoupées de bonnes séquences d'astrophysique et de génie militaire. Les personnages sont bien décrits, intéressants, et toujours l'anodin le dispute à l'important, maintient l'attention et conserve l'effet de surprise. Vous aurez la surprise de découvrir au cours du récit des personnages aussi saugrenus que al Capone et Fletcher Christian : Hamilton reprend à son compte des personnages célèbres, précisément revenus d'entre les morts, pour asseoir son récit. L'emprunt est amusant, et démontre une certaine verve.

J'ai beaucoup aimé la fin de l'histoire, pour des raisons d'endurance (le plaisir final d'en parvenir à bout) et de philosophie : la singulière « révélation » qui boucle le récit est tout à fait actuelle, totalement deus ex machina, et finalement très simple en regard du laborieux chemin qui y conduit. J'y souscris tout à fait, et donne mon admiration à un homme capable d'une telle masse de travail et de talent pour prouver un point aussi évident. Et l'incarnation du méchant en la personne de Quinn Dexter est tout à fait remarquable de vice et de méchanceté.

Alors que dire de mal sur ce roman ? Peu de choses : d'abord le personnage de Louise, qui m'a agacé pendant une bonne partie de l'aventure comme personnage colossalement nunuche, la longueur du démarrage (à opposer à la vivacité des deux derniers tomes) et puis une forme de conscience que ceux qui iront au bout du roman l'aimeront forcément : les autres l'auront déjà laissé échappé au premier tome.
Lien : http://www.immobiletrips.com..
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