AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Melisende


J'entends parler d'Anthelme Hauchecorne depuis quelques mois. Mais qui peut bien se cacher derrière ce nom un peu étrange ? Curieuse de découvrir l'univers bien particulier de l'auteur, j'ai été ravie de gagner La Tour des illusions lors d'un concours organisé par Païkanne il y a quelques mois. Evidemment, je n'ai pas encore eu le temps d'ouvrir ce dernier et c'est donc avec Ames de verre, dernier-né de Monsieur Hauchecorne et premier tome d'une nouvelle série, que je plonge dans l'imaginaire de l'auteur et découvre sa plume.
Plus de 650 pages, c'est souvent (enfin pour ma part) un peu effrayant et l'auteur a intérêt à être sacrément bon pour m'embarquer aussi longtemps sans que je ne me décroche la mâchoire à force de bailler. Ici, pari réussi ! Les pages ont défilé rapidement devant mes yeux et je n'ai rencontré aucun temps morts. J'ai été happée très vite et n'ai pas décroché avant d'avoir tourné la dernière page. J'ai d'ailleurs été ravie d'apprendre qu'il s'agissait d'un premier tome et que la suite était en préparation. de futures bonnes heures de lecture en perspective !

Avec ce nouveau titre, Anthelme Hauchecorne nous offre une fantasy urbaine riche, complexe et passionnante. Il ajoute à notre ville contemporaine de Lille, un univers parallèle teinté de mythologie celte, que seuls les Eveillés (ceux qui possèdent la Vue), peuvent voir. Dès lors que vous avez gagné ce don (de naissance ou par « accident »), vous êtes en mesure d'apercevoir les Streums, ces monstres venus de l'Autre Monde (du Sidh). Tous n'ont pas le même aspect (une classification complexe et passionnante apparaît au fil des pages) et tous ne sont pas foncièrement mauvais (ou peut-être que si ?) mais chacun d'entre eux souffrent du Mallogène, cette faim qui les ronge et les oblige à s'attaquer aux humains (généralement) pour se nourrir.
Pour canaliser ces Daedalos (autre nom, plus « scientifique » pour désigner les Streums), une organisation secrète s'est mise en place au fil des siècles. Rassemblant des Eveillés plus ou moins désireux de combattre (tout un groupe d'Eveillés sont appelés les « Dormeurs » car ils préfèrent se creuser les méninges autour d'une table plutôt que d'aller en première ligne), la Vigie possède une hiérarchie bien définie et semble être toute puissante…
Je pense qu'avec ces quelques lignes, vous percevez la complexité et la richesse du contexte mis en place par Anthelme Hauchecorne. Et c'est ce que j'ai préféré dans ma lecture. J'en ai assez des livres « jeunesse » qui restent en surface et se contentent de poser des bases peu expliquées pour rester « crédibles »… quelle joie de tomber sur un univers dense, fouillé, réfléchi et maîtrisé ! Et je suis sûre qu'il recèle encore bien des surprises que j'ai hâte de découvrir dans le deuxième opus !

Les premières pages peuvent sembler un peu sibyllines mais Anthelme Hauchecorne maîtrise la structure de son récit et nous apporte les informations au compte-goutte, ni trop ni trop peu d'un coup. Vous trouverez des renseignements plus ou moins détaillés dans le récit « principal » mais également et surtout dans les extraits du « Codex Metropolis » (livre rédigé par les premiers Piliers de la Vigie dont le premier tome est offert à la lecture des Recrues, à leur arrivée). le lecteur se retrouve ainsi complètement transporté dans cette ville de Lille, intègre et digère toutes les informations sans problème, au fil des pages. Il me tarde très sincèrement d'avoir la suite entre les mains pour pouvoir retrouver toute cette faune, tout cet univers si bien amené.
D'ailleurs, l'auteur nous tisse une atmosphère bien particulière pour englober tout ce petit monde. Durant toute ma lecture j'ai eu l'impression d'avoir un voile gris, une sorte de crachin devant les yeux. Comme si la ville de Lille était constamment plongée dans des teintes sombres et tristes où ne parviennent à survivre qu'une population un peu punk, un peu destroy. C'est vraiment comme si on se glissait dans les entrailles peu accueillantes, glauques de la ville, comme si on découvrait tous ses mauvais côtés. Attention, âmes sensibles, s'abstenir, quelques scènes retournent légèrement l'estomac.

Dans ce premier tome, Anthelme Hauchecorne s'attarde sur deux personnages « principaux ». D'une part Camille, une jeune fille Eveillée, recrue pour la Vigie, qui tente de devenir Chasseuse. Elle est à l'épreuve depuis un an mais on ne lui facilite pas la tâche. Pourquoi cherche-t-elle à tout prix à être initiée et à obtenir ce statut dangereux ? Pour avoir accès à l'En-deçà, la zone à moitié dans notre monde, à moitié dans le Sidh, où elle pourra trouver des informations sur son enfant, enlevé à la naissance. de son côté, Vincent, quarantenaire veuf, a perdu son ex-femme et sa petite fille dans des circonstances mystérieuses (circonstances qui seront élucidées au fil du récit). Au début on ne comprend ni pourquoi ni comment, mais il est impliqué dans l'enquête qui tourne autour du « Marchand de sable » et est donc destiné à croiser le chemin des membres de la Vigie. Sous ses airs de père de famille effondré par la perte des êtres chers, Vincent cache un côté très sombre…
J'ai particulièrement aimé les personnages créés par Anthelme Hauchecorne. Bien croqués, avec du relief, ils possèdent une personnalité complexe, un passé fouillé. de façon générale, j'ai préféré, il me semble, suivre les péripéties de Camille (peut-être est-ce simplement car il s'agit d'une figure féminine pas bien plus jeune que moi, à laquelle j'avais donc plus de chance de m'identifier ?) mais ne boudais pas mon plaisir lorsque je retrouvais Vincent et sa quête de réponses et de vengeance. Des personnages charismatiques et marquants qui, dans un contexte lui-même riche, offrent des aventures vraiment plaisantes à suivre.

J'en viens à l'intrigue en elle-même. On peut, je pense, la qualifier d'enquête puisque les personnages sont à la recherche d'un meurtrier qui ne laisse derrière lui, que du sable imprégné du sang humain des victimes (mais les corps sont introuvables). Vous vous doutez bien que les « Streums » ont quelque chose à voir avec toutes ces disparitions inexpliquées. Mais comment les histoires de Camille et de Vincent peuvent-elles être liées ? Voilà ce que le lecteur apprend au fil des pages.
J'ai particulièrement aimé le choix de l'auteur au niveau de la forme. le point de vue omniscient permet en effet au lecteur d'être sur tous les fronts et de rassembler lui-même les pièces du puzzle pour résoudre l'énigme. Ainsi, selon les chapitres, on suit alternativement Camille et Vincent, leurs péripéties étant parfois entrecoupées par les extraits du codex Metropolis qui permettent de pointer du doigt quelques détails vu précédemment dans le récit.
A noter que les chapitres sont courts, offrant ainsi un rythme soutenu au lecteur. Rythme d'autant plus vif que la narration se fait au présent. Je suis souvent un peu fébrile face à cette utilisation du présent de narration qui n'est, contrairement à ce que l'on peut penser, pas du tout facile à maîtriser. Dans Ames de verre, rien à redire, les phrases coulent de source et c'est un plaisir à lire ! Et moi qui suis parfois un petit peu gênée par les interventions très « oralisantes » de personnages ; ici encore, j'ai trouvé les passages en registre familier tellement crédibles et ancrés dans l'ensemble que je n'ai jamais été dérangée.
Enfin, quelques mots pour signaler l'attention particulière accordée au livre en tant qu'objet : les extraits du Codex sont sur un fond grisé, de même que les extraits du journal intime de Vincent et plusieurs illustrations en noir et blanc (signées Pascal Quidault) viennent habiller le texte. En bref : une forme à la hauteur du fond !


Je crois, sincèrement, que je n'ai aucun point négatif à vous apporter. Je cherche, je cherche, mais je ne trouve pas. L'intrigue est peut-être un peu complexe à suivre dans la dernière partie, lorsque toutes les histoires s'entremêlent, mais ce n'est l'affaire que de quelques paragraphes pour que tout soit à nouveau clair dans nos têtes. de cette histoire, je retiens les personnages bien croqués, la construction maîtrisée de la narration et surtout, l'univers très riche mis en place par Anthelme Hauchecorne. Il me tarde de plonger un peu plus loin dans l'aventure et de découvrir d'autres Streums empruntés à la mythologie celte !
Lien : http://bazardelalitterature...
Commenter  J’apprécie          170



Ont apprécié cette critique (16)voir plus




{* *}