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Critique de meeva


Bon, c'est un ouvrage un peu complexe pour moi, il y a beaucoup de mots qui me sont si ce n'est inconnus, du moins pas familiers et qui définissent, qualifient ou précisent des notions que je ne maîtrise pas. Mais tout est cependant exposé très clairement et de fait, que de choses apprises, découvertes au moins, à la lecture de ce livre.
Françoise Héritier apporte son expertise et son expérience pour clarifier les notions de masculin et de féminin à travers les âges. Ces notions ne sont pas niées mais leur origine est expliquée de manière culturelle et pas biologique, même si leur expression peut découler de faits biologiques.
Françoise Héritier montre que le genre existe dans la relation à l'autre et que les combinaisons possibles sont limitées en nombre. de là, elle fait, non pas un tour du monde, cela laisserait entendre une certaine exhaustivité, alors disons une promenade à travers différentes ethnies, différents groupes humains, pour comprendre pourquoi partout le masculin a pris l'ascendant sur le féminin qui est donc considéré comme le sexe faible, inférieur.
Ainsi, certains aspects vont être décryptés sous l'éclairage du mythe, de la croyance : les relations de parenté, les notions de fécondité et de stérilité, théories sur le sperme et le sang, leur influence sur le lait, les figures archaïques de la masculinité avec les « monstres », la construction raisonnée du genre. On rejoint la modernité avec des réflexions sur les nouveaux modes de procréation et la question de la reproduction et du droit à l'enfant. On apprend ainsi que de nombreuses sociétés définissent les liens de parenté indépendamment des liens du sang.

Dans une ethnie d'Afrique, les femmes étaient mariées parfois avant même de naître. Mais à la puberté, elles pouvaient choisir, ou leur mère choisissait pour elles, un compagnon qui leur correspondait bien. Elles restaient avec lui jusqu'à être enceinte, ou trois ans au maximum si aucune grossesse ne se déclarait. A ce moment-là, elles rejoignaient leur mari, choisi antérieurement par la famille et l'enfant à naître était officiellement l'enfant du mari, qui n'était pourtant pas le père biologique. Étonnante pratique qui toutefois apportait quelques avantages aux hommes, en particulier de ne jamais subir leur infertilité s'ils en étaient touchés.
La conception des enfants faisait l'objet de toutes sortes de croyances. Il était admis, je ne sais plus pour quel peuple, que les femmes fournissaient par leur sang, puisqu'il ne coulait plus pendant leur grossesse, le squelette du bébé, tandis que les hommes fournissaient par leur sperme, le sang et les organes du bébé, le sperme étant considéré comme une transformation du sang de l'homme. Et c'étaient les rapports sexuels qui façonnaient le bébé ; ils devaient donc être nombreux et puissants pendant les six premiers mois de la grossesse.
Chez les inuits, les enfants pouvaient naître avec une âme d'un sexe différent que leur sexe biologique. Une fille née avec une âme de garçon était alors élevée comme un garçon : habillée comme les garçons, elle participait alors aux activités masculines, jusqu'à sa puberté du moins, où elle devait alors reprendre la vie et les activités correspondant à son sexe biologique. Ce phénomène était vrai dans l'autre sens, avec un garçon que l'on élevait comme une fille durant son enfance. Ces considérations permettent évidemment de distinguer le sexe et le genre.

Tous ces exemples – il y en aurait tant encore, comme les femmes qui deviennent des hommes au regard de la société, épousant femmes et se faisant appeler « père » par les enfants que ces femmes ont avec d'autres – sont là pour illustrer ce que Françoise Héritier nomme la valence différentielle des sexes, point commun entre toutes ces sociétés, parfois si différentes entre elles, et la nôtre.

Un livre qui permet d'enrichir sa réflexion d'un regard éclairé et renseigné sur le monde. Cela permet de relativiser certains débats, en particulier la notion de parent biologique quand on voit la diversité qui s'est toujours révélée dans la parentalité et son exercice parmi les différents peuples.
Complexe, mais passionnant !

Lien : https://chargedame.wordpress..
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