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Critique de kuroineko


Higuchi Ichiyô, bien que peu connue en Occident, est considérée comme la première femme écrivain professionnelle au Japon. Elle publie en plusieurs parties Qui est le plus grand? entre janvier 1895 et janvier 1896. Elle meurt cette même année de la tuberculose.

Ce roman se déroule dans un espace très fameux du Tokyo d'alors : celui qui entoure le quartier des plaisirs de Yoshiwara ("la plaine des roseaux"). Dedans gravitent maisons de thé, courtisanes de haut rang ("oiran") ou simples prostituées, geishas et toute une foule de marchands ambulants, clients plus ou moins cousus, ... Presque un univers à part, tout comme le Gion de Kyoto.
Vivant à proximité de ce lieu hors normes, la jeunesse y est plus précocement délurée. Les principaux protagonistes du roman sont d'ailleurs des adolescents entre treize et seize ans. On sent un certain souffle du changement les frôler, les amenant pas à pas vers leur destinée. Midori, la jolie cadette d'une aînée qui s'est vendue comme courtisane, sait avoir à suivre le même chemin. Shinnyo, lui, est appelé à marcher dans les traces de son père en tant que bonze d'un temple bouddhiste (un bonze haut en couleur et à la tempérance toute relative, le paternel!). Shôtarô enfin a déjà commencé à seconder sa grand-mère dans le recouvrement des prêts sur gage de la boutique.
Le rythme des saisons induit les changements à venir, l'hiver annonçant la mort de la douce saison de l'enfance.

Bien que de formation littéraire extrêmement classique, Higuchi Ichiyo débride ici son pinceau en invoquant un Tokyo populaire et le quotidien des simples gens. Les commérages vont bon train, les jeunes garçons s'essaient à des poses viriles et chic, les fêtes du quartier déploient ses artistes de rue et gargotes temporaires. L'auteure signe ici une chronique vibrante de vie. Elle qui vécut dans un lieu plus cossu, a loué un temps avec sa mère une petite boutique dans un milieu populaire. Cette expérience donne toute sa véracité et son naturel au récit.

On sent d'ailleurs, même à ce niveau, les rivalités en matière de rang entre les habitants du Boulevard (la rue principale) et le Faubourg (les venelles et ruelles à l'arrière), le second socialement inférieur au premier.

Le récit m'a beaucoup intéressée. Les renvois aux multiples notes en fin d'ouvrage sont parfois un peu fastidieux mais très instructif quant aux éléments de la vie de tous les jours comme aux références littéraires ou musicales qui parcourent le roman.

En revanche, le texte ne m'a pas touchée, émotionnellement parlant. Sans doute cela tient-il à la prose particulière de l'ère Meiji à laquelle la lectrice occidentale du XXIème siècle que je suis n'est pas habituée. Pour autant, c'est un livre que je recommande à tout curieux de cette époque charnière du Japon, entre des restes de l'époque Edo et une marche en avant rapide vers le modernisme.
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