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Critique de Romain28


Je n'avais lu de Chester Himes et il y a longtemps, que La « Reine des pommes » et il ne m'en était pas resté un grand souvenir, surement parce que n'y avais pas retrouvé l'ambiance et les figures du Roman Noir qui m'étaient familières dans les récits de Chandler, Goodis ou J.H Chase.
Avec ce livre ci , je réalise que je suis passé complètement à coté de cette première lecture.
« La Croisade de Lee Gordon » ou « La croisade solitaire » est tout simplement un livre extraordinaire, un vrai choc de lecture.
D'abord par son incroyable acuité et lucidité politique.
Et c'est justement en ne s'embarrassant pas du folklore des personnages habituels, des outrances et provocations de rigueur , que Chester Himes en grand styliste sans afféteries, parvient à épurer sa ligne , son trait, pour livrer bien mieux que le spectacle d'une violence complaisante et théâtralisé, celui infiniment plus dévastateur et dérangeant , de la violence symbolique tant sur son versant social que racial.
Ici Lee Gordon , jeune noir fraichement diplômé, déclassé au point de végéter au mitan de la 2nd guerre mondiale dans une usine d'armement aérien, et désireux de s'investir dans une carrière de syndicaliste , va non seulement se trouver en but au mépris de classe de sa hiérarchie mais va devoir affronter hostilité , et manipulation là ou il ne la soupçonnait pas.
C'est la ou Chester Himes frappe infiniment fort, dans cette façon limpide et implacable de mettre à jour l'instrumentalisation d'un individu déjà stigmatisé et isolé, par une direction syndicale opportuniste et trouble et un Parti Communiste américain, stalinolatre, converti à l'effort de guerre, et dans ce contexte peu réceptif aux désirs d'émancipations sociales et raciales.
Comme si ce racisme qui ne pas dit pas son nom, ne suffisait pas , Lee Gordon doit aussi en découdre avec sa communauté, démobilisée et désorientée, rongée par le sentiment de la haine de soi .
Dans ce tableau toujours actuel du marché de dupes entre les acteurs du mouvement social les minorités racisés, rien ne semble pouvoir échapper pour C.H, du moins en 1947 , à la désespérance la plus totale si ce n'est peut etre , la satisfaction que procure la lucidité du regard et de l'analyse ressort et levier pour réinventer un véritable projet de transformation sociale.
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