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Critique de Er-et-cel


Tout le monde a pu lire ou entendre un résumé détaillé de ce livre, étant donné le buzz qu'il a créé. Donc, je ne vais pas rentrer dans les détails. Schématiquement, il y a 2 parties:
1ère partie: l'affliction. le narrateur, prof de fac, déprime, n'a plus le goût de vivre. Il a eu tout ce qu'il pouvait rêver d'avoir, il n'a plus d'envies ou presque. Parallèlement, la société française dans laquelle il vit (celle de François Hollande) va aussi bien que lui, donc pas mieux: agonie de la social-démocratie, président de la république inexistant, FN en forte progression etc..
2ème partie: la rédemption. La France est dirigée par un nouveau président. Etat de grâce, réformes profondes, baisse des violences dans les quartiers. La vie politique semble reprendre. Parallèlement, notre héros de prof, retrouve lui aussi le moral: sollicité par la Pleïade, courtisé par l'université. Bref une nouvelle vie s'ouvre à lui. Fin.

Le titre du livre rappelle la signification du mot Islam, "soumission à Dieu" (devenue religion officielle en France dans la deuxième partie) ainsi que la soumission des femmes dans les sociétés musulmanes. Mais il y a une autre soumission, celle qui a dû amuser Houellebecq et horrifier certains lecteurs : la soumission nécessaire des universitaires. Après l'élection du nouveau président, tous les universitaires qui veulent garder leur poste doivent devenir musulman. Et il ne semble pas que cela gêne beaucoup de monde parmi les enseignants.

Ce roman est une belle satire sociale, d'autant plus amusante que l'on connait bien les personnages. Houellebecq glisse, ici un commentaire vachard sur F. Hollande, là une pointe sur Manuel Valls.. Bayrou est déguisé en Justin Bridoux et la Marine en Merckell. Satire et parfois farce également: ses propos sur la polygamie, les fantasmes masculins, les scènes érotiques, ressemblent plus à des provocations de sale gosse qu'à une volonté moralisatrice. Si l'on veut trouver un moraliste dans ce livre, ce serait plutôt, selon moi, dans la peinture narquoise des grandes et petites lâchetés de ses comtemporains.
Quant à la fiction politique proposée - une France musulmane - elle est d'abord très originale puisque personne n'y avait pensé auparavant. Elle dérange certes, elle déstabilise nos convictions car l'auteur est habile. Mais n'est-ce pas la fonction même d'une oeuvre littéraire que de jeter le doute dans nos esprits? nous interroger?

J'ai entendu Patrick Cohen interviewer Houellebecq. Cela ressemblait à un procès en inquisition. Houellebecq avait tué la République, avait installé un régime islamique extréme..comme si ce qui est raconté allait réellement arriver et que Houellebecq en serait responsable.. Bigre! c'est une fiction monsieur Cohen. Ne craignez rien, tout va bien.. Avez vous pensé à interroger Orwell, Huxley, Burgess de la même façon, en leur temps ? Quant à Manuel Valls, j'ai lu qu'il aurait déclaré: "la France, ça n'est pas Michel Houellebecq, ça n'est pas l'intolérance". Voilà Houellebecq excommunié maintenant ! J'ai envie de reprendre une question récente de Régis Debray, même si elle n'avait pas de rapport avec ce roman: "Est-ce que nos ministres peuvent ouvrir un livre ?". Je doute que Manuel Valls ait lu ce livre, car on y trouve d'abord l'éloge de la littérature qui peut seule "vous permettre d'entrer en contact avec un autre esprit". le narrateur soutient que l'homme a besoin de spiritualité et Il montre beaucoup d'humanité pour des personnages secondaires, habituellement transparents: le gardien de la Sorbonne, le chauffeur de taxi, le moine.. Ah, c'est vrai, il critique drôlement les socialistes et cela c'est peut-être insupportable même quand on a un grand sens de l'humour. En tous cas, nulle part je n'ai vu d'intolérance, de racisme, ni d'intention politique sournoise. Et puis, comme dit l'auteur: aucun roman n'a jamais modifié une
intention de vote..

J'ajouterai pour ma part: Un gars qui est né à la Réunion et qui écrit si bien, peut-il être vraiment un mauvais bougre ? Je vous le demande.
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