AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Lucilou


Retrouver la famille Cazalet, c'est tout d'abord un rendez-vous un peu incertain, que l'on appréhende un peu. Ce rendez-vous que l'on a donné à quelqu'un qu'on a follement aimé et la crainte d'être déçu. La peur que les retrouvailles ne soient pas à la hauteur de nos espoirs et de nos désirs, que la magie n'opère plus, qu'elle n'ait été qu'un mirage de plus.
C'est dangereux les retrouvailles, c'est glissant. Tout comme les derniers tomes des sagas littéraires dont on a aimé les premiers avec passion et gourmandise.

Retrouver la famille Cazalet, après le saut dans ce "Nouveau Départ" se révèle tout autre. Ni la déception, ni le désamour ne sont à l'affiche de ce rendez-vous qui, sous ses airs un peu sages de lecture réconfortante et familière (comme une bonne tasse de thé pu-erh au coeur d'un froid mordant) au creux de laquelle il fait bon se nicher tient toutes ses promesses, sans se départir ni de sa profondeur, ni de sa richesse, nous réservant au passage quelques surprises. "Nouveau départ" est définitivement un opus d'envergure, un panneau d'une richesse époustouflante au coeur de la grande fresque romanesque née de la plume d'Elizabeth Jane Howard.

La guerre est enfin terminée, mais en Angleterre -comme dans toute l'Europe- tout reste à reconstruire. Londres est dévastée, ruinée et porte les stigmates des bombardements qui l'ont impitoyablement ravagée tandis que les habitants vivent encore de tickets de rationnement et de privations en tout genre. C'est là, à la lisière d'un monde nouveau, que nous retrouvons les membres de la dynastie Cazalet, toujours aussi attachants, toujours aussi complexes, profonds. L'heure des choix a sonné pour la plupart d'entre eux. Les adultes ont vieilli et gagné en cynisme sinon en amertume tandis que les enfants ont grandi et tente de se frayer un chemin dans cette nouvelle ère, la guerre ayant rebattu les cartes à qui-mieux-mieux. Sous nos yeux et tandis que les personnages avancent chacun à leur manière, on sent poindre une évolution quant à la places des femmes dans la société. Pour autant et même si le divorce semble se démocratiser, rien n'est encore gagné, en témoignent les errances et les difficultés de nos trois cousines préférées pour s'insérer et être heureuses -enfin!- dans un monde que les hommes dominent encore.

Tout comme dans les opus précédents, la narration alterne les focalisations, jouent avec les points de vue, contribuant à nous rapprocher de chaque personnage dont même les plus secondaires parviennent à éveiller notre sympathie voire notre empathie grâce au talent de la romancière qui mêle habilement aux péripéties romanesques de sa saga des passages éblouissants d'introspection de la part de ses protagonistes. C'est -encore une fois - brillant! La multiplicité des voix et des points de vue, outre qu'elle nous offre une délicieuse saga familiale riche de ses secrets et de ses non-dits, de ses rancunes et de ses amours, constitue une formidable radiographie de la société anglaise de l'après-guerre, sans alourdir le propos, bien au contraire.

On retrouve ainsi avec bonheur Louise qui devient enfin elle-même après avoir fait la paix avec son passé, Polly toujours si émouvante, Clary qui n'en fini pas de se noyer, Edward dont l'évolution ne cesse de me surprendre et de m'interroger, Villy, Zoë, Rupe, Archi, Rachel... Ils sont tous là et c'est un bonheur. Une réunion de famille post-covid, et la joie de retrouver ceux qui nous ont tant manqué même s'ils nous agacent parfois.
Des intrigues évoluent et aboutissent, se dénouent tandis que d'autres semblent atteindre un point de non-retour, les personnages évoluent et gagnent en maturité. le fin du roman apporte une vraie note d'espoir et de lumière dans cette saga fleuve où tous ont dû lutter pour avoir le droit d'être eux-mêmes et le plus heureux possible.
A bien des égards, "Nouveau départ" résonne comme une fin... Dix-huit ans après l'avoir écrit, Elizabeth Jane Howard a pourtant écrit une suite dont les événements se situent neuf ans après la fin de ce tome IV. Forcement, il reste des choses à raconter... et même si je suis toujours dubitative quand un auteur propose de si tardives suites, j'ai hâte de savoir où ma famille adoptive so britannique en sera à l'aube des années 60, de la mini-jupe et des premiers tubes des Beatles.

Vivement!

Commenter  J’apprécie          361



Ont apprécié cette critique (31)voir plus




{* *}