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Critique de Myiuki


"Belle et Bête" ou la chronique d'un délire médiatique ... ou plutôt, de celui d'une femme. Voilà ce qui me vient à l'esprit quand je pense à ce livre. J'ai tout simplement halluciné d'un bout à l'autre de ma lecture. Mais, je vais trop vite en besogne. Avant d'en dire plus, revenons sur les raisons qui m'ont donné envie de lire ce roman, et que j'aurais mieux fait d'ignorer !

Si j'ai voulu lire ce bouquin en premier lieu, c'est à cause de sa couverture qui m'a fait totalement craqué (j'adore, j'adore, j'adore !), mais c'est surtout à cause du buzz qu'il créait déjà bien avant sa sortie. Oui, oui, je sais, c'est une très très mauvaise idée que de vouloir lire un livre sous prétexte qu'il crée la polémique. Mais, ça m'a fait le même effet que pour "Cinquante nuances de Grey", il fallait que je sache ! Alors, je l'ai lu et ça a été une pilule amère à avaler. D'un ennui mortel, ce livre censé nous rapporter la liaison de la narratrice avec DSK (alias, "le porc") s'annonçait croustillant au possible - "oh mon Dieu ! des révélations, je veux des révélations !!!" -, choquant - dégoûtant, je veux bien, mais choquant ? On repassera ! -, déroutant - ça, il l'a été, pour sûr ! - et totalement hors normes - ô cruelle déception ! -. J'en attendais beaucoup parce qu'on me l'avait encensé, d'un côté, et de l'autre, on l'avait totalement démoli. Quand il n'y a pas de juste milieu, ça a tendance à m'intriguer, et je dois dire après lecture que je comprends parfaitement pourquoi on ne peut que trancher dans le vif à la sortie d'une telle ... fiction ? Impossible d'être "entre-deux", soit vous aimez, soit vous détestez. Clairement, je me positionne dans la deuxième catégorie, même si, je dois nuancer légèrement mon propos en raison de quelques points que j'aborderais plus loin. Un livre qui fait parler de lui, que ce soit en bien ou en mal, est toujours un livre que l'on vend et je pense sincèrement, d'ailleurs le but est clairement avoué à deux reprises dans ce bouquin, que ce roman a été publié avant tout pour son aspect rentable, commercial. Une confession intime qui compare DSK à un porc et qui salit son image (était-il encore besoin de l'enfoncer plus avant alors qu'il est déjà au fond du trou ?), forcément, ça fait vendre ! Les gens sont assoiffés de ragots. A ceux-là je dis, vous n'apprendrez rien que vous ne soupçonniez déjà en lisant ce livre !

On avait tous plus ou moins une opinion sur l'homme en lui-même avant la sortie de ce livre, pour ma part, la lecture de cet ouvrage ne l'a en rien changée. Et j'irai même jusqu'à dire que cette femme qui se dresse en psychologue de bas étages, tentant d'expliquer le pourquoi du comment de la personnalité de DSK, m'a parue bien plus antipathique que le "porc" qu'elle nous décrit sans cesse. Limite, j'ai eu plus de compassion et de pitié pour celui-ci que pour elle, car on sent, dès le départ, qu'il n'a été qu'un jouet pour elle, l'instrument d'une manipulation qu'elle a orchestrée de bout en bout ... Ce livre est une leçon, celle d'une manipulatrice qui prend le dessus sur le roi des manipulateurs, il faut le faire et je lui reconnais ce mérite, elle l'a clairement berné ! Mais, ça va bien au-delà de ça, j'y reviendrai. Pour l'heure, je dois dire qu'au départ, l'idée de la belle et de la bête m'a séduite, je m'explique. Clairement, on ne peut décemment pas considéré DSK (même s'il n'est pas nommé dans le livre, tout le monde sait que c'est lui !) comme un beau gosse, c'est une évidence, du coup, pas de doute, la bête c'est lui, et ça colle, plus ou moins. La belle, Marcela Iacub, donc, puisque c'est ainsi qu'elle se désigne, j'ai de gros doutes. La belle, si on se réfère au conte, je la voyais douce, gentille, attentionnée, bref, tout le contraire de la narratrice. Au début du roman, je me suis placée de son côté à elle, d'office, sans réfléchir, la femme larguée, bafouée, celle qui souffre ... à la fin du roman, j'ai changé de camp. Etrange, hein ? Ce livre qui est censé, de mon point de vue, abattre un peu plus DSK, me l'a rendu plus ... humain. Des deux, c'est elle qui est devenue bête, dans tous les sens du termes, à mes yeux. Je ne peux m'accorder sur sa vision tronquée des choses, sur son appréciation d'elle-même et sur ce qu'elle débite dans ce roman comme autant de vérités séculaires et qui, en dehors du fait que c'est totalement exagéré par moments, m'a paru totalement farfelu.

En effet, comment sentir de la compassion pour une femme qui, non contente de s'ériger en une sorte de réincarnation de Voltaire (le pauvre ! il doit se retourner dans sa tombe !), se qualifie elle-même de, je cite : "sainte", "nonne", allant jusqu'à s'octroyer le rôle de martyre et starifiant son nom et son action ... qui jusqu'alors m'étaient totalement inconnus ! Elle s'approprie dès les premières lignes un pouvoir qu'elle n'a pas et qu'elle a voulu subtiliser dans ce livre a celui qui l'a perdu ... par avidité ? Allez savoir ! La narratrice a la force des mots pour elle, certes, je ne peux lui enlever un certain style qui m'a maintenue éveillée lors de ma lecture et je dois reconnaître qu'elle a eu quelques heureuses tournures de phrases et/ou initiatives. Il est clair que son style est loin d'égaler celui de Voltaire ou de nos grands écrivains et philosophes français, mais elle en a indubitablement un. Elle dit beaucoup sans tout dévoiler. A coups de phrases courtes, elle imprime un rythme rapide à son livre qui ne donne pas le temps au lecteur de trop réfléchir et qui le force plus à subir ce qu'on lui expose. Je ne sais pas comment l'expliquer, ce n'est pas foncièrement mal écrit, parce que j'ai capté un style fort, un potentiel, mais pourtant, je pourrais tout aussi bien dire que tout cela n'est que prétention et qu'il n'y a ici ni forme, ni fond cohérents. Ce livre me déroute. C'est peut-être le but recherché d'ailleurs ... Perdre son lecteur dans ses filets, le laisser dans le flou en lui faisant miroiter des "croustillons" et le laisser ressortir de là les mains vides ... Je n'ai pas, pour ma part, la prétention de comprendre les motivations de l'auteur avec ce livre, je ne cherche pas à savoir, je ne fais qu'exprimer mon avis personnel sur cette lecture. Mais, ce que je peux dire de la narratrice, c'est qu'elle m'a horripilée du début à la fin. Cette femme avec laquelle j'aurais voulu compatir, que j'aurais voulu voir en victime, peut-être aussi quelque part, je l'ai vu en accro des strass et paillettes, en femme avide, d'attention, de pouvoir, d'amour. Impossible de me connecter à elle et comme on a que son point de vue dans l'histoire, impossible de m'impliquer dans le roman et de m'y attacher ... voilà le gros point faible du roman : son héroïne qu'on a envie, clairement, de secouer un bon coup et de ramener sur Terre !

Cela dit, je dois reconnaître que l'idée du porc était originale et bien trouvée, là-dessus, rien à dire ... enfin, en principe. Parce qu'il faut quand même avouer que c'était too much cette histoire. Que ce soit un postulat de départ, ok, c'est un choix d'écriture, très bien, mais en faire des tonnes comme dans tout ce roman, je me pose sincèrement la question : pourquoi ? Finalement, ce porc devient une excuse, un prétexte, plus qu'une justification, comme on veut nous la faire apparaître. Il y a DSK et, en lui, bataille deux personnalités : l'homme, public, et le porc, privé. Waouh ! Quelle révélation ! En même temps, ce principe peut s'appliquer à une grande part de la gent masculine en général, pourquoi le singulariser ici ? Ca n'a rien de neuf ou d'exceptionnel. Franchement, pour moi en tout cas, tous les hommes qui trompent leurs femmes sont des porcs, peu importe leurs déviances "sexuelles". Ils sont dégoûtants, c'est un fait. de facto, on peut considérer DSK comme un porc, très bien. Mais honnêtement, quel est le but de la manoeuvre ? La narratrice nous dit aimer ce porc, limite, lui vouer un culte, elle n'aime pas l'homme, elle aime le porc en lui. Très bien, c'est son choix ! En même temps, elle a effectivement choisi d'entamer une relation avec un homme marié ... Bref, ce qui m'a énervée là-dedans, outre les répétitions à outrance d'un même concept, c'est le fait que ce parallèle avec le porc n'était pas foncièrement nécessaire à mon avis puisque, comme je le disais plus haut, les phrases qu'elle nous débite en les appropriant aux porcs, on peut très bien les généraliser à l'homme, tout court. Pourquoi se cacher derrière une métaphore bidon ? Alors oui, ces phrases-là avaient du sens la plupart du temps, étaient pertinentes, du moins, l'auraient été sans qu'elles soient systématiquement ramenées à l'animal. Je pense qu'elles auraient eu plus d'impact si elles n'avaient pas été obscurcies par l'image porcine qui y était appliquée ... c'est devenait lassant à la fin ! Quel est le but là-dedans ? Je cherche encore ...

Et c'est la le problème majeur du roman, parce que cette métaphore était justement ce qu'il y avait de plus "croustillant" dans l'affaire, parce qu'elle permettait, sous couvert de revisiter le conte de la belle et de la bête, de "balancer" un peu. Eh bien, j'ai un scoop pour vous ! Ici, pas de révélations majeures, pas de choses qu'on ignore ... Non, on nous donne à voir dans trois scènes, des choses intimes, que certains pourraient qualifier de déviantes voire de dégoûtantes, mais, rien de sensationnel non plus, c'est comme si on s'y attendait avant d'ouvrir le roman, du coup, pas de frissons d'excitation, pas de sensations fortes. C'est barbant, ennuyeux, fade. Après, je ne dis pas que c'est "normal" ce qui se passe dans ce roman, loin de là, je pense même que la narratrice aurait besoin d'une bonne thérapie, mais c'est, et là encore le parallèle me paraît évident avec "Cinquante nuances de Grey", beaucoup de bruit pour rien, c'est nettement plus soft que ce à quoi on s'attend quand on écoute la façon dont l'auteur parle de son roman. Je ne sais pas comment décrire cette fiction qui n'en est pas vraiment une, on finit par s'y perdre. Parce que, même si les chapitre sont courts, de même que les phrases utilisées, ça nous paraît long, mais long, mais long. Je l'ai lu au ralenti ce livre, principalement aussi parce que je n'arrivais pas à me remettre tout de suite des énormités que nous sortaient l'auteur (petit spoiler, le coup de la chute systématique après "l'extase", c'est quand même un peu gros, non ???). J'ai eu le sentiment farouche que l'auteur prenait clairement son lecteur pour un imbécile heureux et qu'elle le menait en bateau du début à la fin ! S'érigeant en croisée, en martyre, en prophète, elle se prend définitivement pour ce qu'elle n'est pas ... une star ! Je ne la connaissais pas du tout avant de lire ce livre, même si, apparemment, elle pensait déjà être le centre du monde bien avant ça. Après, et c'est la qu'est le problème avec ce genre littéraire semi-autobiographique, est-ce vraiment l'auteur qui parle ou uniquement la narratrice ? La frontière est si fine que je m'y perds ... est-ce un rôle ou est-elle réellement comme ça ? Si elle est comme ça dans la "réalité, au secours !

Quoiqu'il en soit, ce roman ne peut laisser indifférent son lecteur. On passe par toutes les étapes avec lui, la compassion, le dégoût, la haine, la révolte, la colère, mais, quoique ces émotions soient toutes fortes, il n'y en a pas vraiment de positives, car même la compassion qui devrait venir naturellement est comme forcée. On nous impose des sensations inconfortables, on nous expose des situations sur lesquelles on voudrait fermer les yeux. C'est peut-être ça aussi le but du roman, ouvrir les fenêtres sur ce qui se passe derrière les rideaux. Ce n'est pas beau à voir, ça vous donne envie de vomir, de hurler ... d'agir ! On ne reste pas impassible face à ces pages qui défilent comme autant de bonbons amers fondant dans votre bouche. On assiste, stoïque, à un spectacle qui nous révolte, à une confession qui ne nous émeut pas mais qui nous pousse à réfléchir, d'une manière générale plus que particulière d'ailleurs, sur la relation homme/femme. Comment peut-on accepter ça ? Comment peut-on le vouloir ? C'est un livre étrange, à la fois fascinant et repoussant, qui vous déroute mais qui, fatalement, vous marque d'une manière ou d'une autre. Soit on l'adule, soit on l'immole. Vous devez, quoiqu'il en soit, choisir un camp. Je ne pensais pas me trouver face à ce type de lecture en ouvrant ce roman, j'ai été surprise, par la qualité de l'écrit (même si entâchée trop souvent à mon goût) et par la pauvreté du sujet (tout n'est que répétition d'une même idée laconique), ces deux extrêmes cohabitant dans une sorte de récit indéfinissable, plus une attaque d'une défense. Non, on ne peut pas définir ce texte, parce qu'il n'est pas clair, parce qu'il se cache, qu'il feint, qu'il ne joue pas franc-jeu. Et comment faire confiance à une narratrice qui trouve que se faire appeler "truie" est le plus beau des compliments ? Pour moi, c'est impossible. le fait de ne pouvoir m'attacher à aucun des personnages du texte, fussent-ils réels, m'a totalement distanciée de cette oeuvre que je n'hésiterais pas à qualifier de nauséabonde par bien des aspects. On est franchement pas loin d'un navet monumental. Je ne peux pas être si tranchante dans mon avis final à cause de certaines fulgurances du style qui m'ont frappées (comme le fameux SMS "te voir et mourir") mais, honnêtement, je ne ferais certainement pas partie des supporters de Marcela Iacub ... ni de DSK d'ailleurs.

Pour conclure, une fois encore, le buzz a parlé, et a fait couler beaucoup d'encre sur ce que je qualifierais de "vent". C'est un roman creux, vide, narcissique, que nous propose ici l'auteur. Elle ferait mieux d'arrêter de se prendre pour ce qu'elle n'est pas et redescendre un peu sur Terre, même si on ne peut nier qu'elle a un certain talent. Lu et aussi vite oublié, son roman est loin de valoir tout le bruit qu'il suscite, pour moi, il est sans intérêt ... Mais, comme chacun doit se faire son propre point de vue, n'hésitez pas à le lire ... mais empruntez-le, ne l'achetez pas ;)
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