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Critique de Bookycooky


Un cliché de photo en noir et blanc, qui s'anime. Deux personnages centrales, deux filles, une de dos, et dans le coin droit en bas, un homme en uniforme qui marche et tourne le dos au photographe....c'est ainsi que déambulent dans l'histoire de Drago Jancar, deux des trois protagonistes du roman, Ludwig dit Ludek et Sonja. Nous sommes en 1944, en Slovénie , ex-Yougoslavie à l'époque, à Maribor, “ ville libérée, rattachée à la patrie allemande”. Ludwig est allemand et officier SS, et Sonja, slovène. Ils sont tous les deux de Maribor et se sont rencontrés dix ans auparavant dans d'autres circonstances. A la rencontre de ces deux personnages entre en scène le troisième protagoniste, Valentin, petit ami de Sonja, arrêté par les Allemands. Jancar, caméra à l'épaule, suit ces personnages échappés de la photo et de son imagination, un regard extérieur qui ne juge pas .....Il va nous déployer un scénario assez classique avec sa propre vision des choses, le sel de cette histoire émouvante et éprouvante. Un ton très slave, sobre mais pourtant riche en nuances et détails subtils et sensuels, où l'auteur joue entre l'intimité profonde des personnages, leurs ambivalences et leurs apparences publiques. Comme dans le cas d'Hans et de Ludwig son supérieur qui ne rechignent pas à torturer et tuer des hommes, parlant d'un plat de rognons, dont le premier en raffole dit à l'autre, comme une plaisanterie ,”–Je ne pourrais pas regarder abattre les bêtes,....Et ensuite, retirer les rognons. Et toi ?”....de l'humour morbide qui se plante comme un clou dans l'histoire, comme celle « des clous » de Ludwig !

Je dois avouer que ces histoires de la deuxième guerre mondiale, avec ses allemands inhumains et arrogants et leur classique d'horreurs de guerre me lassent et j'évite d'en lire, mais la plume de Jancar qui m'avait séduite avec « L'élève de Joyce », et le billet d'Arabella ont été trop tentants. D'emblée, il décortique le mal avec le personnage odieux de Ludwig (« ce lézard, ce reptile, ce prédateur, »), suivi de ses subalternes, encore plus violents et plus dégoûtants. Une fois encore je suis sidérée face à l'effort, le temps, l'argent que l'homme dépense pour faire du mal, et à quel fin ? Bien qu'il soit ici question du passé, ça perdure toujours au présent, en s'amplifiant, avec des méthodes plus sophistiquées, et toujours à la base les instincts de l'homme primitif. Son récit pointe aussi le nationalisme, actuellement en forte montée en Europe et de l'autre côté de l'Atlantique et la situation de Valentin, me fait penser à un film coréen, vu récemment , “Entre deux rives”, de Kim Ki-duk: il n'y a pas les bons et les méchants , il y a ceux qui ont le pouvoir et ceux qui ne l'ont pas, et selon que celui-ci change de main, les bons deviennent très vite des méchants. le seul faible rayon de soleil du récit c'est l'Amour. Un amour soumis au repos, lourdement mis à l'épreuve par la guerre.......

“....qu'est-ce que Dieu a à voir avec ce qu'on a fait, ce qu'on fait ? Dieu n'est ni dans le vacarme ni dans le grondement, mais dans le murmure, le frémissement des feuilles de peupliers là-bas, loin dans la plaine.”



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