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Critique de Salome20s


N'ayant pas lu le premier tome, je me suis tout de même laissé tenter par le roman d'Andrea H. Japp. Malgré un lien étroit avec le livre précédent, l'histoire est accessible dès ce deuxième volume puisqu'un petit résumé et une liste des personnages permettent de planter le décor.
Nous voilà donc projeté quelques siècles auparavant, en 1348, pendant que l'épidémie de peste noire ravage les ruelles du vieux Paris.
Dès le début du roman, l'auteure nous plonge dans cet univers trouble et instable qu'était le Moyen-Âge, et ce par plusieurs moyens.
Le plus remarquable d'abord, le point que j'ai préféré, a sûrement été l'écriture en elle-même. D'un style extrêmement riche, l'auteure a su me remémorer mes cours d'ancien français !
En effet, usant d'une langue ancienne, de nombreuses notes occupent le bas des pages. Ces enrichissement linguistiques, étymologiques et historiques imprègnent chaque ligne du roman d'un réalisme passionnant. Historienne et romancière, Andrea H. Japp porte une double veste et le résultat est très convaincant.
J'ai également aimé les personnages qui sont très éloignés des clichés que nous pouvons rencontrer dans des romans empruntant la même époque. Effectivement, les caractères des protagonistes sont aussi sombres que leur époque. Ici, les femmes se servent de leurs statuts pour arriver à leurs fins et la puissance ne rime pas avec bonne naissance. J'ai particulièrement apprécié le personnage de d'Adeline, la matrone de Gabrielle. Forte et franche, elle ne se limite pas à son propre rang social et s'émancipe de toute autorité.
Dans ce roman, la part des femmes est supérieure de celle des hommes. Les veuves ne se cachent pas sous leur voilage de deuil, ou seulement pour dissimuler un sourire en coin, tandis que les religieuses cachent de vils désirs entre les perles de leurs chapelets.

La trame, découpées en plusieurs évolutions de plusieurs personnages est très bien construite. Les protagonistes font preuve d'un réalisme psychologique et nous percevons leurs changements. le personnage de Gabrielle est selon moi l'un des plus intéressants. Bafouée par un mari, elle s'émancipe alors des hommes et fait preuve d'une grande puissance. Doté d'une grande sensualité littéraire, ce personnage porte autant bien la robe de dame que le pantalon d'homme ! Cette ambiguïté donne un trait ambivalent au personnage presque insondable de Gabrielle.

Ayant déjà lu quelques romans dont l'histoire se passe au Moyen-Age, j'ai souvent été confrontée à un style très chevaleresque avec des trames composées de belles dames en détresse, de preux chevaliers bravant moult dangers, un peu cliché. Or, dans ce roman, pas du tout. le style est loin d'être lyrique, bien au contraire. Brutal et sans ménagement, le déroulement de l'histoire reste très proche de la réalité historique. Il ne s'agit pas d'une intrigue amoureuse ni d'un sauvetage, mais plutôt de la quête sournoise d'un objet d'art et surtout d'une vengeance féminine.

Ce livre est un divertissement mêlé d'un voyage dans le temps. Passionnée d'Histoire, j'ai appris une quantité de choses sur les coutumes au Moyen-Age, l'Ancien Français (que j'avais déjà étudié) et même sur certaines figures historiques emblématiques. le mystère de cette sombre époque donne du suspense à la trame générale. Des oeuvres d'art interdites... des livres cachés au Vatican uniquement lus par des illustres papes, des complots alliant des personnes d'ordres des plus éloignés... ce roman fait preuve d'une richesse extraordinaire.

Le vocabulaire est si précis qu'il est presque possible de sentir les effluves d'alcools mauvais et de chou sortir des fameux tripots ! Quel plaisir de lire un roman qui offre de véritables images, le lecteur se mute presque en un spectateur et le schéma cinématographique anime chaque scène. Peut-être d'un jour, les romans d'Andrea H. Japp seront adaptés au cinéma ?

J'ai également beaucoup apprécié les annexes à la fin de l'ouvrage. Il y a notamment une petite explication au sujet des origines de l'épidémie de Peste Noire en Europe. Cet approfondissement nous aide à mieux comprendre ce mal qui a traversé de nombreuses périodes historiques. Les explications scientifiques de l'auteure sont très claires et les références aux sciences d'autres civilisations sont passionnantes.

Un mot sur l'esthétisme du livre. Édité chez Flammarion, le roman est très beau. La couverture sombre et inquiétante, ça nous plonge directement dans l'univers de l'histoire. J'ai également beaucoup aimé la deuxième et troisième de couverture colorées en rouge vif. Peut-être une mise en garde sur le caractère sanguinolent de certaines scènes ?

Pour finir, j'ai passé un très bon moment pendant cette lecture. Peut-être que je conseillerais tout de même de lire le premier tome avant le second. Plusieurs personnages ont déjà un passé intéressant rattaché au premier volet de la saga, il est donc parfois difficile de cerner le caractère de ces derniers.

Pour les amateurs d'Histoire, la série La Malédiction de Gabrielle sera un véritable voyage dans le temps avec Andrea H. Japp en tant que guide.

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