L'histoire de
Vivian Maier est évidement romantique, mais ce qui m'étonne le plus, est la fascination qu'elle a suscité. Je ne peux m'empêcher de m'interroger à ce sujet. Quoi, une femme qui prend des photos, mais pour elle-même, pas pour les publier, ni en tirer aucune gloire? Et qui se contente de ce travail méprisé, désuet, de bonne d'enfants? Oui, je sais, le terme politiquement correct dans son cas est "gouvernante", lequel fleure bon son 19ème siècle. Et en plus, elle meurt pauvre. Inacceptable!
Alors, il faut lui inventer une histoire. Remonter la piste de ses parents, de ses grands-parents, romancer son départ du Champsaur pour l'Amérique, puis son bref retour dans cette vallée des Alpes. Créer, au passage, un personnage ambigu: pour certains des enfants qu'elle a gardés, elle fut une nounou adorable, et pour d'autres, une sorte de garde-chiourme sadique.
Il faut avouer que
Gaëlle Josse se tire plutôt bien de cet exercice. Son style descriptif, sans fioritures, convient bien aux images sans complaisance de
Vivian Maier.
On est en plein dans le mythe de l'artiste incompris de son temps, mais après tout, ce n'était qu'une femme. Au passage, on voit bien comment le petit monde de l'art fonctionne, le Moma (Metropolitan Museum de New York) n'a pas voulu de ses photos, au prétexte qu'elle ne les avait pas sélectionnées elle-même. Tout comme ce photographe de village, qui refusa de les lui développer.
Tiens, ma mère aussi adorait prendre des photos, avec son vieux Kodak anguleux, qu'elle appelait par dérision sa boîte à savon. Elle aussi n'a pas eu la belle vie. Je devrais peut-être la raconter!