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Critique de Julaye30


Femmes de réconfort est un roman graphique de Kyung-a Jung, auteure sud-coréenne diplômée en histoire. En feuilletant ce livre, je n'étais pas attirée par les dessins. Mais le sujet m'intéressait, j'avais déjà entendu parler des "femmes de réconfort", esclaves sexuelles de l'armée japonaise pendant la seconde guerre mondiale. Ce livre très documenté, m'a permis d'apprendre beaucoup de choses.

Déjà j'ignorais qu'il y avait des occidentales parmi ces femmes. le début de l'ouvrage relate l'histoire de Jan Ruff O'Herne, militante néerlando-australienne, qui a grandi à Java (à l'époque une colonie hollandaise). Pendant la guerre, Java est envahie par le Japon. Nous sommes en 1942, Jan a dix-neuf ans, elle est emmenée dans un camp de prisonniers. En 1944, les jeunes filles et les jeunes femmes de ce camp sont emmenées de force dans des maisons closes destinées à l'armée impériale japonaise. Des Javanaises, des Chinoises et des Coréennes les rejoignent. Jan a gardé le secret pendant cinquante ans. Ce n'est qu'au début des années 1990 que la parole s'est libérée. En 1992, la première manifestation des Halumny, "femmes de réconfort" est organisée. Ces femmes survivantes, esclaves sexuelles (certaines dès l'âge de dix ans) ont vécu avec le poids de ce secret. le Japon dément l'existence de ces maisons closes.

Dans la deuxième partie du livre, l'auteure précise que les "femmes de réconfort" existaient déjà bien avant la Seconde guerre mondiale pour la marine japonaise. En 1937, le massacre de Nankin entraîne de nombreux viols. Les autorités utilisent alors ce prétexte pour constituer des maisons closes pour l'armée : éviter le viol par le viol. La plupart des femmes recrutées croient être embauchées pour travailler dans une usine; certaines sont arrachées à leurs familles; d'autres enlevées dans la rue grâce à la collaboration de la police. Dans ces maisons de réconfort où les fenêtres donnent uniquement sur un couloir, les femmes sont violées plus d'une vingtaine de fois par jour et sont utilisées comme un défouloir par les soldats. Quand elles tombent enceintes, on les fait avorter. Nombreuses sont celles qui sont devenues stériles à la suite de ces traitements. L'ouvrage traite aussi d'Aso Tetsu. Ce gynécologue fut chargé d'examiner le premier groupe de femmes pour l'armée japonaise. Sur ces 100 femmes, on dénombrait 80 Coréennes et 20 Japonaises. Aso se montre obnubilé par les maladies vénériennes et réalise des travaux de recherche au sein des maisons de réconfort sans état d'âme pour ces femmes.

La troisième partie s'intéresse aux maisons de réconfort dans le Pacifique pendant la guerre. Des espaces sont également prévus dans les abris antiaériens... L'auteure nous parle ensuite du sort de ces femmes après la défaite. Certaines parviennent à s'enfuir. Mais avec l'arrivée des troupes alliées, ce n'est pas fini. le gouvernement met en place des maisons de réconfort ... pour les alliés ! et se met à la recherche de nouvelles femmes. "Après la libération de la Corée, les nouvelles proies étaient les Japonaises pauvres qui se retrouvaient sans famille". le ministère de l'intérieur justifie cette "mesure nationale d'urgence" en 1945 affirmant qu'elle "préserve ainsi éternellement la pureté du sang du peuple et offre à des milliers de femmes une digue contre les vagues de la folie." (rapport cité p200). Cela n'a bien entendu pas empêché de nombreux viols commis sur la population japonaise par les forces d'occupation.

Malgré un apriori sur le graphique, je ressors bouleversée par cette lecture, le coeur complètement retourné, glacée par l'horreur. C'est réellement un ouvrage intéressant. L'auteure a mené des recherches approfondies, s'appuie sur des documents variés et des témoignages de rescapées.
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