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Critique de Lutopie


Kakfa aime bien les K (K sociaux, K cliniques). Karl (le K de l'Amérique, le Disparu) est sur le point de disparaître à moins qu'il n'ait déjà disparu, dans les bas-fonds de la ville de New-York. Karl, expulsé, banni, honni de sa famille, débarque d'Europe. Karl, c'est le Kandide de Kafka. C'est qu'il a commis une faute - grave la faute - originelle. Il est, en conséquence de ses erreurs, condamné à rater à sa vie ; ayant pris un faux départ. Il rate absolument tout ; c'est ce qui fait de lui un raté. Il n'a pas posé le pied en Amérique qu'il commet déjà des erreurs, fatales. Il rate le débarquement du bateau parce qu'il se rend compte qu'il a oublié son parapluie derrière lui. Il laisse sa valise à quelqu'un, pour retourner chercher son parapluie, mais il perd, au final, son parapluie et sa valise et puis il se perd dans les couloirs du bateau. Il s'égare, sans cesse. Il cherche sa place. Il s'invente une vie. Il parle à tort et à travers, surtout lorsqu'il parle pour les autres, au nom des autres. Il perdra son chapeau, son costume, ses papiers d'identité, son identité, en somme, au fur et à mesure et il endossera les habits des autres. Tout ce qui lui arrive semble absurde, parce qu'il se comporte mal, ne connaissant pas les codes ou les outrepassant pour telle ou telle raison, et il se retrouve engagé de force, auprès de l'oncle Jakob ; qui lui laisse entrevoir les hautes sphères de la société mais là encore, il sera maltraité, séquestré, chassé. On se moque de lui, et il s'en rend à peine compte ; on ricane en le montrant du doigt, on l'humilie.
Ce roman d'apprentissage est marqué par la honte et par la dérision.

De mauvaises rencontres se font, des opportunités se présentent, qu'il saisit ou qu'il ne saisit pas (parce qu'il ne comprend rien à ce qui se passe) ; et il tente comme il peut, de manière assez maladroite, de manière malhonnête même, parfois, la malhonnêteté venant soit de Karl soit des autres parce que Kafka joue des malentendus, pour projeter Karl dans des situations incroyables, impossibles, sans issue. Et au lieu de faire ce qu'on attend de lui, ou ce qu'il attend de lui-même, c'est à dire de se faire une place dans la société, de progresser sur l'échelle sociale, en partant de l'échelon le plus bas, il descend toujours plus bas. Il prend pas mal de fois d'escaliers, pas mal de fois l'ascenseur, étant même embauché, plus tard, comme liftier (garçon d'ascenseur, émotionnel), avant d'être licencié. Il monte et il descend, il monte et il descend, comme les anges dans la Bible qui montent et qui descendent l'échelle du rêve de Jacob. Or, les anges, à la fin du roman, démesurément grands, perchés sur leurs piédestaux, plus ou moins en hauteur, s'avèrent être de vulgaires fantoches.
Il monte sur le piédestal de l'ange, pour le saluer, et il redescend.
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