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Critique de vibrelivre


L'arche des Kerguelen
Voyage aux îles de la Désolation
Jean-Paul Kauffmann
Flammarion, 1993, 247p


Sur les Kerguelen, j'ai lu Marcher à Kerguelen de François Garde, et le voyageur du pays de l'ombre d'Isabelle Autissier. Je lis maintenant avec appétit le livre de Kauffmann, un auteur que j'aime bien. Moi aussi je voyage, comme je peux, aux Kerguelen, les derniers endroits de la planète à être encore mal explorés.
Qui se rend aux Kerguelen, si ce n'est ceux qui ont une mission à remplir, logistique, technique, scientifique, militaire, sur ces îles françaises du bout du monde, au Sud de l'océan Indien, perdues entre l'Afrique du Sud et l'Australie, et peu éloignées de l'Antarctique à laquelle elles n'appartiennent pas ? Ce sont dans un extrême isolement des terres de vent, de tempête, le pays de l'ouragan perpétuel, une nature aride, hostile, des châteaux de basalte, des pierres et des tombes. On trouve du chou dans cette maison du houx, Ker Kelenn. On aurait pu faire commerce de laine, avec l'introduction par les frères Bossière, de moutons, de mouflons, ou faire prospérer une station baleinière. Mais l'île n'en veut pas, elle porterait malheur, les oubliés De Saint-Paul accuseraient davantage La Langouste française, et J.P. Kauffmann y trouve sa vérité, lui qui porte en lui la dévastation. Kerguelen, son découvreur qui n'a pas voulu, osé, y débarquer, n'y a pas fait bonne figure et son expédition lui a valu souffrance et déshonneur. « Le temps n'est pas venu de me justifier, temps heureux pour moi ou après ma mort ». N'y pullulent que lapins, rats et chats. Les pétrels et les loups de mer sont en grand nombre. On y entend le cri navrant de l'albatros fuligineux. Il y a aussi dans ce paysage grandiose et coloré, l'herbe émeraude, les ors sur les roches, le ciel lapis-lazzuli, les restes que laissent les mesquineries des hommes. A Kerguelen, on fait solitude. Cependant les îles sont à découvrir, porteuses d'avenir.
J.P.Kauffmann s'y rend pour accomplir un rêve d'enfant-lecteur, et pour y apaiser ou fortifier son être. Il n'est revenu du Liban que depuis trois ans. Son but est d'admirer l'arche des Kerguelen.
Il part de la Réunion, l'île la plus proche à 3250km, sur le Marion-Dufresne avec une équipe de scientifiques. Il arrive sur la Grande-Terre par un matin calme. Il trébuche. Quelle parodie. Drôle d'aventurier dans la tourmente. Kauffmann éprouvera son vieillissement, ou sa fatigue, en compagnie de ces hommes jeunes, souriants, attentionnés, lui qui marche moins vite, dont le pas est maladroit. Il aura un moment de panique quand contemplant des chutes d'eau, qui ne tombent pas, mais montent sous l'action du vent, et le brouillard se levant, l'obscurité s'étendant d'un moment à l'autre, il ne retrouvera plus le chemin de la cabane. En revanche, il les ébahit en lisant, et par ses lectures.
Kauffmann craint que le mauvais temps ne l'empêche de voir de Port-Christmas la voûte de pierre de 103m de haut. le temps est avec lui, mais l'arche s'est effondrée entre 1908 et 1913.

C'est un livre de voyage extérieur et intérieur. le dehors est fascinant, et le dedans émeut. L'écriture est élégante et mélancolique.
Quelques lectures : Allan Sillitoe, Les Aventuriers de l'Aldébaran
Valéry Larbaud, Aux couleurs de Rome
Patrick O'Brian, L'île de la désolation


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