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Critique de agnesfleury


Je regarde sans doute trop la télévision pour apprécier pleinement la lecture de Jeux de Vilains de Jonathan Kellerman, la 22ème aventure du héro récurrent de l'auteur (du moins, en version française, car depuis deux de plus ont paru aux Etats-Unis). Tout, dans ce livre, évoque un de ces épisodes des Experts, Bones (!), NCIS (ou quelque autre de ces séries qui laissent à penser que les Etats-Unis sont la patrie des serial killers et que le taux de criminalité fédérale doit être extravagant) que l'on regarde paresseusement les soirs de léthargie, en se promettant que ce sera le dernier. Tout, sauf le temps qu'on y consacre… En effet, avec ses 439 pages – qui n'en finissent pas de détails et de rebondissements superflus – Jeux de vilains est loin des 45 minutes calibrées des dites séries américaines, calibrées au cordeau.


Mais, venons-en à l'histoire. On l'entame avec deux teasers (là encore, la technique est largement empruntée à l'écran) :

Alors qu'il s'ennuie à périr à assurer la permanence d'une association de défense du marais local au titre d'heures consacrées à des travaux d'intérêt général, un jeune et riche glandeur reçoit un étrange appel téléphonique ; une voix déguisée et sifflante lui annonce la présence d'un cadavre flottant dans le marais.

Après avoir remporté l'enchère d'un box à moitié vide et mis en vente, car abandonné, un paysagiste en quête de moyens pour arrondir ses fins de mois s'apprête à mettre en vente sur ebay le seul objet de valeur qu'il y a trouvé : une boîte à bijou en bois précieux. Malheureusement, les 42 petits os qu'elle contient vont l'obliger à céder son trésor à la police. En effet, ces 42 petits os représentent l'équivalent de 5 mains humaines.

En soient, ces teasers sont prometteurs… Malheureusement, ils s'avèrent assez anecdotiques car ils ne se raccordent pas de façon très convaincante à l'enquête principale.



Quant au corps de l'enquête, c'est du traditionnel.

Le lieutenant Milo Sturgis, aidé de son ami Alex Delaware, psychologue pour enfants et consultant pour la police, secondé d'un jeune inspecteur (blanc), Moe Reed, et du demi-frère de celui-ci, le privé Aaron Fox (noir), ainsi que de trois anthropologues et de sept physiciens (non, je plaisante pour les physiciens… mais, ça fait quand même beaucoup de monde pour développer la fine analyse psychologique des personnages qu'on serait en droit d'attendre de la part d'un auteur, psychologue de formation) enquête sur le meurtre de plusieurs femmes étranglées et mutilée de leur main droite.

Les ingrédients d'une série à succès sont bien présents : meurtres en série, rituels, ossements, prostitution, une pointe de sado-masochisme… Et pourtant, la recette ne prend pas. de même qu'on se sentait déconnecté de personnages assez inconsistants, on ressent peu d'émotions au déroulé de l'histoire, pas même d'impatience à en connaître le fin mot, puisque le suspens est éventé 100 pages avant la fin.



Le style, peut-être ? Pas vraiment. Plutôt ronronnant. Jonathan Kellerman sait écrire et connaît les ficelles de narration du polar (ou du scénario de polar), mais sa technique n'apporte pas de "supplément d'âme" à son histoire. Ca sent son livre en série. A noter, une étrangeté stylistique qui vient conforter le lecteur dans son impression d'être dans son canapé face à son écran : Les dialogues sont assez déstabilisants, car ils manquent de marques d'énonciation. Ce qui fait qu'on est très souvent perdu et qu'on ne sait jamais vraiment qui prend la parole et pour répondre à qui… Si encore on avait l'image… ce serait moins problématique. Mais, dans le cas présent, cette ambiguïté vient surtout souligner combien les personnages sont interchangeables et peu caractérisés.



La très bonne idée du livre ne vient donc ni de l'intrigue, ni des personnages, mais du lieu où sont retrouvés les cadavres : un marais préservé au coeur de Los Angeles (près de Marina del Rey), une trouée verte et visqueuse dans un paysage urbain. Cet élément naturel dégage une atmosphère immédiatement perceptible et fait travailler l'imaginaire. La meilleure phrase du roman est donc certainement celle-là : "Rien que des oiseaux et des grenouilles qui pionçaient au moment crucial"*.



Agnès Fleury

* Extraits de Jeux de vilains : une enquête d'Alex Delaware, Jonathan Kellerman (Seuil, 2011) - Lu dans le cadre du jury Seuil policiers et Babelio
Lien : http://unchatnoir.canalblog...
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