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Critique de Dossier-de-l-Art


Toujours composés de cinq à six chapitres, les « Guides Hazan » décryptent un mouvement artistique, un style, une technique ou bien une thématique ; ils cernent leur sujet au plus près, grâce à des essais synthétiques explicatifs et des analyses d'oeuvres approfondies. Abondamment illustrés, maniables, pourvus d'une bibliographie et de plusieurs index, ce sont des ouvrages de référence indispensables, mais également de vrais livres d'idées, dans lesquels la personnalité de
l'auteur peut s'épanouir avec bonheur.

Le volume écrit par Marine Kisiel, conservateur au musée d'Orsay et spécialiste de l'impressionnisme, ne déroge pas à cette règle. Il en offre même le meilleur exemple par la finesse de ses développements sur les peintures de Bazille, Caillebotte, Renoir, Monet, Pissarro, Cézanne ou Berthe Morisot. L'auteur n'oublie pas les cas équivoques de Manet et de Degas, respectivement « père » de l'impressionnisme et compagnon de
route du mouvement, ici traités de manière lumineuse. le plan même du livre est très original et permet à tout un chacun de comprendre avec une facilité déconcertante ce qui est moderne dans l'impressionnisme : les sujets certainement, qui font l'objet d'une partie conséquente. Mais aussi la composition et l'exécution des toiles, volontairement inachevée parfois, qui annonce un pan essentiel de l'art du XXe siècle. le rapport des
artistes à la peinture ancienne et à l'héritage de leurs pairs est traité avec tout autant d'acuité, notamment pour les paysages, examinés avec une attention toute particulière. On découvre alors que la mise en page, la touche et l'iconographie des sites naturels impressionnistes sont très recherchées et qu'il s'agit d'une peinture savante, sinon érudite. La section qui concerne l'usage de certains médiums – arts graphiques, ciment, céramique et photographie – ouvre des horizons nouveaux sur un « art décoratif » impressionniste, largement méconnu jusqu'à
aujourd'hui. Cette partie est directement reliée à celle qui traite de la clientèle des peintres et de l'émergence d'un marché de l'art moderne : elle appelle une vision renouvelée de la diffusion de cet art, que l'on croyait pourtant bien connaître et que l'on redécouvre avec un réel étonnement.

Il faut encore mentionner la documentation iconographique, souvent totalement inédite, comme le probable portrait du célèbre galeriste Georges Petit, dont on ne connaissait jusqu'alors pas le visage, devant une partie de son stock. La vue de l'hôtel particulier des frères Bernheim, où les Renoir sont exposés de manière sérielle sur les murs, est tout aussi fascinante ; de même que la reproduction de la porte ornée de fleurs et de fruits par Claude Monet, pour le salon du marchand Paul Durand-Ruel. Une conclusion en forme de « coda », présentant les peintres dits « académiques » qui flirtèrent avec l'impressionnisme (comme Albert Besnard par exemple), n'est pas moins intéressante. Mais il faut surtout souligner la clarté toute gidienne de l'écriture de Marine Kisiel, qui s'offre comme un charme puissant pour le lecteur : pas un mot de trop ; une précision parfaite dans l'expression ; une sensibilité à la fois retenue et vigoureuse, qui fait merveille dans les descriptions et les analyses.

Par Christine Gouzi, critique parue dans L'Objet d'Art 549, octobre 2019
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