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Critique de beatriceferon


J'adore flâner dans les librairies. J'aime beaucoup les ouvrages qui traitent du Japon. Et c'est ainsi que j'ai déniché ce bel album dont l'illustration de couverture ne peut que me charmer : fleurs et papillons, tout mon univers.
Le peintre Utamaro a vécu à la fin du XVIIIe siècle. Il est connu, m'apprend le commentaire, pour des gravures de jolies courtisanes, qui eurent énormément de succès. Des collectionneurs célèbres comme les Goncourt en possédaient un très grand nombre.
Le volume que j'ai acheté rassemble deux albums dans lesquels n'apparaît aucun personnage humain. Ils répondent à une sorte de défi. Il s'agit pour l'auteur de composer un « poème badin sur le sentiment d'amour », mais qui fait référence à l'animal représenté sur l'estampe.
Les éditions Philippe Picquier, spécialisées dans les ouvrages asiatiques, ont sorti ici des fac-similés de grande qualité de deux livres consacrés aux « bêtes du bas, ce qui grouille et qui rampe, et les bêtes du haut (…) [qui] jouissent d'une qualité que l'homme leur a toujours enviée, le vol ».
Ces animaux grouillants et rampants ne sont pas forcément attirants, à première vue. Et pourtant, lorsqu'on tourne les pages, même ceux qui, rien qu'à les nommer, nous semblaient peu ragoûtants, prennent, sous la plume et les couleurs d'Utamaro, une tout autre dimension : la chenille arpente une tige de pois en fleurs, le mille-pattes s'entortille autour d'un bouton d'or, le ver de terre est si bien dissimulé par les feuilles d'heuchère, qu'il faut le chercher attentivement.
Ce qui me surprend, c'est de trouver classés parmi ces insectes, la couleuvre, le lézard ou la grenouille.
Les dessins couvrent deux pages qui se font face et affichent une plante de grand format qui s'étend des deux côtés. Sur chaque planche, un insecte se cache parfois si bien qu'il faut analyser le décor pour le remarquer (la sauterelle, l'escargot, le grillon). A droite, le poème, en japonais, sera repris à la fin du volume en caractères latins et traduit en français.
Ensuite viennent les « myriades d'oiseaux ». le titre seul suffit à suggérer le bruit des ailes, à mon avis. Comme pour les insectes, ils sont posés sur des branches, le plus souvent fleuries. On nous donne leur nom en japonais, puis en français. Certains nous sont familiers (rossignol, gros bec, alouette), d'autres me paraissent étranges (mésange variée, oiseau à lunettes, faisan vert).
Les représentations sont fines, délicates : la mésange à longue queue apparaît en pointillés, les hérons se fondent dans la brume, il faut regarder un certain moment avant de capter que le cormoran est immergé, son bec, sous l'eau, tient un petit poisson.
Les poèmes, qualifiés de « burlesques », sans doute parce qu'ils sont basés sur des jeux de mots dans la langue de leur auteur, le plus souvent deviennent, en français, très aériens, vaporeux, un peu mélancoliques :
« Votre coeur volage
Au moineau friquet
Est semblable
D'un coup d'un seul la rumeur
Prendra son envol. »

« Pareil, tout pareil
A une chenille
Emmitouflé dans ma couverture
Étendu au fond de la froide
Barque des adieux. »

J'ai adoré ce sublime ouvrage.
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