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Critique de cedratier


« L'IGNORANCE » Milan Kundera (Folio, 230 pages).
C'est plutôt un « petit » roman par la taille (ne pas se laisser abuser par le nombre de pages, c'est écrit en gros caractères).
Joseph, exilé tchèque vivant au Danemark depuis plus de vingt ans, retourne à Prague après l'effondrement de l'Union Soviétique. Au même moment, Irena, exilée tchèque vivant à Paris, fait le même voyage retour. Jeunes, ils s'étaient croisés, s'étaient manqués bien avant de s'exiler, ce dont Joseph n'a plus aucun souvenir, contrairement à Irena. Ils sont supposés être heureux tous les deux de renouer avec leur pays d'origine, leurs racines, tant l'exil est présumé être un traumatisme engendrant la nostalgie. Mais Kundera prend le contre-pied de ce sens commun, montre, à travers ces quelques journées en Tchécoslovaquie des deux personnages (qui vont bien sûr s'y recroiser), l'effet du temps, des coupures, l'impossibilité des retours, l'incommunicabilité qui en résulte.
Avec une remarquable technique d'écriture, dans un style épuré et dépouillé, il mêle petite et grande histoire, narration et réflexion, convoque à maintes reprises Ulysse et son Odyssée, la musique et la peinture. Il s'immisce parfois par un « Je » d'auteur dans le texte, suivant le cheminement intellectuel et affectif de ses protagonistes, nous ramenant à eux après chaque digression historique et philosophique. Et c'est pourtant limpide, je n'ai jamais ressenti l'impression de confusion dans ce texte, mais parfois des abîmes vertigineuses, des émotions intenses. Bref, c'est un magnifique roman autant qu'un essai. Kundera mène son histoire, et en même temps il « théorise » son propos sur l'exil, le temps qui passe, l'oubli, sans jamais nous perdre. Un très grand roman, par un très grand auteur, à lire et à redécouvrir.
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