AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de ODP31


La sagesse de l'incertitude.
Cette définition du roman selon Kundera se retrouve dans toute son oeuvre et dès l'ouverture de ce monument de la littérature du 20 ème siècle. L'homme n'a qu'une vie et la pesanteur de ses choix n'a d'égale que la légèreté de son existence. Impossible de rembobiner sa vie et de savoir quel aurait été le cours de son histoire si d'autres chemins avaient été empruntés. Pour supporter cette impasse et ne pas se fouetter d'éternels regrets, autant prendre la vie comme elle vient.
L'histoire est connue mais autant la radoter, car elle est belle. Tomas est un brillant chirurgien qui vit à Prague en 1968. Il est plus intéressé par ses conquêtes féminines que par l'agitation politique. Il épouse Teresa, jeune femme tourmentée, jalouse et ivre d'idéaux politiques et amoureux. Etouffé, Tomas multiplie les infidélités, notamment avec une amie, Sabina, photographe, individualiste et éprise de liberté.
Lors du printemps de Prague, Tomas et Teresa s'enfuient en Suisse mais la jeune femme ne peut se résoudre à vivre loin de chez elle et elle rentre seule. Tomas doit alors choisir entre une vie helvète légère où il peut s'épanouir dans son métier et étancher sa soif amoureuse ou rejoindre Teresa, perdre son travail et s'exposer à la répression communiste. Il rentre à Prague, devient laveur de carreaux et le couple part vivre à la campagne avec leur chien, Karenine.
Comme tous les palais romanesques, l'accès à ce livre impressionne. Rien que le titre nécessite la prise de Paracétamol. J'ai mis les patins pour glisser à pas feutrés sur cette prose cirée. Dès la première phrase, Nietzsche est cité. Il faut s'accrocher ODP. J'ai parfois été obligé de relire certains paragraphes car j'avais eu la maladresse de cligner de l'oeil entre deux phrases. Il faut dire que chaque décision d'un personnage est suivie d'un commentaire philosophique. Penser à ne jamais inviter Milan Kundera à un diner. du coup, il est difficile de s'attacher au récit car les digressions laissent le lecteur spectateur de l'histoire. En fait, j'ai eu l'impression que l'auteur ne cherchait pas à retenir mon attention et d'assister à une conférence. Il m'a fallu un bon moment (je ne suis qu'un homme) pour comprendre que cette prise de recul avait pour ambition d'inviter à la réflexion sur le sens unique de la vie. Je suis content d'avoir attendu d'être à maturité pour m'engager dans cette lecture. Plus vert, la pesanteur aurait eu raison de ma légèreté.
Il ne s'agit donc pas seulement d'une belle histoire d'amour au milieu des chars russes. Ce n'est pas davantage le roman d'un intellectuel exilé contre le régime communiste et ses mythologies. Ses personnages sont autant victimes de l'histoire que de leurs choix personnels. Il s'agit plutôt selon moi d'une méditation sur la liberté individuelle et sur les forces contraires qui secouent nos existences.
Chaque lecteur de ce roman garde un souvenir de ce voyage littéraire. Pour moi, ce sera la fin de vie du chien Karénine. L'attachement de Tomas et Teresa à cette bête témoigne de plus d'humanité que tous les états d'âmes qui tourmentèrent leur passion amoureuse.
Pas étonnant qu'un auteur mythique entre dans la Pléiade de son vivant.



Commenter  J’apprécie          1119



Ont apprécié cette critique (96)voir plus




{* *}