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Critique de Arimbo




« Rien dans ce livre n'est vrai ».

C'est l'incipit de cet excellent livre décapant et pessimiste de l'auteur d'Abattoir 5 (dont j'ai lu de magnifiques critiques enthousiastes sur Babelio) publié en 1963, soit deux ans avant Abattoir 5.

Un livre qui est découpé en parties très courtes (il y en a 127 au total!) et débute comme une chronique à l'humour impassible, aux situations absurdes, et aux personnages improbables. Mais progressivement le lecteur découvre derrière ce récit loufoque, une critique acerbe de la bêtise humaine, de l'absurdité de la guerre, du mensonge des religions, bref de toutes ces inventions que l'homme a faites pour se donner l'illusion de son pouvoir, de son sentiment d'être un « élu », de sa vie après la mort, de la supériorité de son groupe, quel qu'il soit, sur les autres groupes humains, bref de tous ces mensonges que l'homme a créés pour justifier ses actions, et pour donner du sens à sa vie, de ces illusions dont le jeu de ficelle qu'est le berceau du chat est le symbole.

Le narrateur est Jonas, journaliste qui projette d'écrire un livre sur ce que faisait le Docteur Hoenicker, le père de la bombe atomique, ainsi que sa famille, le jour où la première bombe entraîna la destruction complète d'Hiroshima.
Son enquête va le conduire vers le laboratoire où travaillait Hoenicker, puis à la rencontre de ses enfants, Newt, Angela et Franck. Il obtiendra des réponses un peu étranges des deux premiers, puis, partira vers une République « bananière » des Caraïbes, la République de San Lorenzo, où Franck Hoenicker est devenu l'adjoint du Président « Papa » Manzano, un Dictateur d'opérette, dont le principal intérêt pour Jonas est qu'il a une fille adoptive superbe.
Dans cette île, une religion nouvelle a été inventée par un certain Bokonon. Elle est interdite par le Dictateur, et ses adeptes persécutés.
Les préceptes des « Livres de Bokonon », cités par le narrateur, font faire un contrepoint permanent au récit. Ce sont parfois de petits poèmes rimés et loufoques. Ils font d'abord sourire ou même rire par leur humour absurde, mais très vite, le lecteur réalise que l'auteur nous fait une critique acerbe de la bêtise et du mensonge des humains, des religions, des guerres, et de sa conviction du caractère inéluctable de la fin de l'humanité.
Ainsi cette phrase qui est terrible et d'actualité, en ces temps d'emballement du dérèglement climatique, et de guerres absurdes et meurtrières:
"Et je me rappelai le Quatorzième Livre de Bokonon, que j'avais lu intégralement la veille. le Quatorzième Livre est intitulé « Existe-t-il, pour un Homme Réfléchi, une Seule Raison d'Espérer en l'Humanité sur Terre, Compte Tenu de l'Expérience du Dernier Million d'Années ? »
Le Quatorzième Livre n'est pas long à lire. Il consiste en un seul mot : « Non. »"

La suite des aventures fait intervenir une autre découverte du Docteur Hoenicker, la glace-9 (que possèdent les enfants du savant), et qui transforme en glace incroyablement dure tout ce avec lequel elle rentre en contact.

Et l'issue brutale et apocalyptique de cette fable n'est finalement qu'une image de ce qui attend notre humanité, à part qu'avec l'effet de serre, ce sera un peu plus long.
Le livre se conclut par les dernières lignes que Bokonon a rédigé pour terminer ces « Livres », en fait totalement anti-religieux , impitoyables pour la bêtise humaine, et pour « Qui vous savez », ah, oui, vous savez, celui dont on dit « Notre Père, qui êtes aux Cieux…. »

«Si j'étais plus jeune, j'écrirais une histoire de la bêtise humaine ; et je monterais jusqu'au sommet du mont McCabe, où je m'allongerais sur le dos avec mon histoire en guise d'oreiller ; et je prendrais par terre un peu du poison bleuâtre qui transforme les hommes en statues ; et je me transformerais en un gisant au sourire sardonique, un pied de nez dressé vers Qui-vous-savez. »

Voilà un livre qui pousse la caricature jusqu'à l'absurde, mais si, comme l'écrit Vonnegut en préambule, « Dans ce livre rien n'est vrai », la folie des humains et leurs mensonges religieux, politiques, racistes, etc.. sont bien réels.

Et dernière remarque, l'humour parfois avec de gros sabots, lui, est inénarrable, il faut lire le livre pour le goûter…ou pas. Moi, j'ai aimé, mais je conçois que ça ne plaise pas à tout le monde.



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