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Critique de Pasoa


Dès que l'on évoque la poésie grecque, immanquablement apparaissent les noms de Constantin Cavafis, et plus proche de nous, ceux de Georges Séféris, Odysseus Elytis et Yannis Ritsos. Ils sont les très grands représentants de la poésie grecque, les incontournables d'une oeuvre littéraire unique.
Parler de la poésie grecque contemporaine, même après la lecture de cette remarquable anthologie, relève de la gageure, d'un pari difficile à tenir, tant son champ est multiforme, foisonnant.

Depuis les années 50, la poésie grecque jouit en effet d'une vitalité assez exceptionnelle. Bien qu'elle n'ait jamais véritablement connu d'école, de courant littéraire, bien qu'héritière d'une grande tradition classique, qui emprunte au genre de l'épopée et au chant, la création poétique en Grèce n'a jamais eu de cesse de se renouveler, de se perpétuer, de s'interroger aussi, dans une grande diversité de style, de formes mais aussi dans ses sources d'inspiration.

Ce renouveau littéraire n'a cependant jamais renoncé de se référer aux mythes anciens, aux récits épiques mais également aux liens quasi religieux qu'elle entretient avec les éléments, avec la terre et la mer. C'est cette part de la poésie grecque contemporaine qui la rend si particulière, si attachante.

« D'abord il y eut la mer
Je suis né entouré d'îles
Je suis une île surgie le temps de voir
la lumière, dure comme la pierre
puis sombrer.
Les montagnes sont venues après.
Je les ai choisies.
Il fallait bien que je partage un peu le poids
écrasant ce pays depuis des siècles. »*

Dans cette remarquable anthologie dirigée par Michel Volokovich, qui assure également le choix et la traduction des poèmes, j'ai beaucoup aimé la découverte de nombreux auteurs mais aussi et surtout, de textes pleins de justesse et de sensibilité, de poèmes aux subtiles nuances, à l'imaginaire débordant de paysages, de couleurs, des rythmes du vent et de jeux de lumières, qui porte en elle les récits du quotidien, du banal, les rumeurs de la ville, des ports, la promesse des lointains,... le tout dans une écriture touchante, une subjectivité qui révèle tout l'espace de l'introspection et de l'intime.

C'est avec plaisir que j'ai (re)découvert des textes de grands noms de la poésie grecque, des auteurs aussi essentiels que Kikí Dimoulá et Zoé Karèlli, des figures connues et moins connues de Yòrgos Thèmelis, Tàkis Sinòpoulos, de Titos Patrìkios ou encore de Nìkos-Alèxis Aslànoglou, chacun portant en soi une source et un talent d'écriture qui m'a donné envie d'en savoir un peu plus sur leur oeuvre poétique (tous malheureusement ne sont pas traduits en français).

Poète (et poétesse) témoin d'une époque, d'une histoire, poète de la guerre et de l'espoir, poète voyageur, poète solitaire et rêveur, poète inquiet et méditatif, poète nostalgique, idéaliste perdu, poète attentif et silencieux, poète des paysages et des villes,… Cette Anthologie de la poésie grecque contemporaine nous offre les portraits de tous ces poètes, venus d'un pays – la Grèce – qui n'en finit pas d'investir notre imaginaire.

« Je veux que le poème soit nuit, errance
dans des rues isolées, des artères
où la vie vient danser. Je veux
qu'il soit combat, non pas musique dénouée
mais passion d'exprimer en soi l'incohérence
le désordre qui prendra feu si l'on ne joue pas
le tout pour le tout

Tandis que les autres, indifférents, sûrs d'eux
se gaspillent ou se préparent le soir
à mourir, toute la nuit je cherche des petits cailloux
incorruptibles dans le monologue de chaque jour
même très usés. Qu'ils brillent
dans leur épaisse obscurité, maigres insectes
hasardeux, que le sens tue
et qu'abreuve le sentiment »


(*) Titos Patrìkios - poème "Les montagnes" (mai 1968) - p. 132
(**) Nìkos-Alèxis Aslànoglou - poème "Ars poetica" - p. 146
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