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Critique de fbalestas


Voilà un livre que je n'aurais pas choisi naturellement, si je n'avais pas entendu une interview de l'autrice et qu'elle m'avait touchée par son récit.

J'ai passé effectivement un bon moment en compagnie d'Anna, la narratrice, au cours d'une journée de sa vie parisienne.

Anna est la fille d'une mère féministe, Nine qui lui a inculqué des principes forts – comme celui de ne pas se laisser avoir par les tâches dites féminines, de ne pas dépendre des hommes pour vivre - et tous ces messages importants qui ont émergés dans les années 60 par ces femmes qui luttaient pour sortir de leur condition de femmes au foyer. Mais Nine est en maison de retraite et perd un peu la boule : difficile à admettre pour Anna qui va la voir aussi souvent que son travail le lui permet.

Mais Anna a aussi trois filles, dont l'une d'entre elle, l'aînée, a « quelque chose d'important à lui dire » et va venir dîner le soir. Une autre d'entre elle est une féministe des années 2020 dans le prolongement radical du mouvement MeToo.

Anna a aussi un mari, mais elle découvre que celui-ci semble avoir une liaison extra-conjugale et Anna en souffre, comme on peut l'imaginer.

Et puis Anna a enfin (et surtout ?) une bande d'amies, une sorte de « bouée de sauvetage » qu'elle peut déclencher à tout moment, pour quelques SMS de soutien échangés rapidement, ou pour se retrouver autour d'un verre dès que l'appel au secours est lancé.

Il y a bien sûr un côté « Mrs Dalloway » dans ce récit transposé de Londres à Paris, de 1925 à 2021. le ton est mélancolique : on sent poindre, derrière la vie de cette parisienne intégrée – elle est éditrice comme on le sait, avec quelques moments savoureux sur le monde de l'édition, l'arrivée d'une nouvelle Manager qui ne veut plus éditer que des livres « feel good » ou bien le suivi d'écrivains dépressifs – une pointe d'accablement chez elle.

Qu'est-ce qu'être une femme quinquagénaire aujourd'hui, disparaissant des écrans radars de la publicité, se voyant reprocher à la fois par une mère hyper active et une fille engagée le manque d'action féministe de sa génération, et vivant une forme d'e trahison par celui à qui elle est liée et mais qui peut aujourd'hui très facilement rencontrer d'autres femmes par un seul clic d'une application sur son Smartphone ?

Olivia de Lamberterie nous livre une fiction douce amère, mais qu'on sent imprégné de son quotidien, avec ce qu'il faut de sensibilité pour nous émouvoir. On peut s'identifier à cette situation de femme, qui voit sa mère perdre peu à peu un esprit qui était très vif jusque là, et qui se sent pousser vers la sortie par de jeunes femmes qui estiment que la génération précédente a été trop indulgente et trop docile au travail. Elle évoque aussi au détour la nouvelle tyrannie qui s'impose aux jeunes mamans sur la façon dont elles sont supposées élever leurs enfants, avec une série d'oukases propagés à travers l'école et les réseaux sociaux.

Sous l'apparente frivolité d'une vie parisienne d'une femme très bien intégrée socialement et sans soucis majeurs, surgit une forme de fragilité face aux évènements (la trahison du mari notamment), voire d'abattement ou bien d'angoisse profonde qui sourd malgré elle, et que les retrouvailles entre amies tentent d'apaiser.

Si le style n'est pas toujours au rendez-vous – Olivia de Lamberterie est éditrice et non pas écrivain, elle n'en fait pas mystère – son récit témoignage touche juste.

Une belle découverte donc pour moi, qui ais pris des chemins de traverse loin de mes auteurs fétiches traditionnels – avec un joli moment de lecture à la clef.
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