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Critique de Bazart


Il est assez ironique de constater que, quelques jours seulement après m'être régalé à lire la biographie romancée de Claude Perdriel , le ofondateur du Nouvel Observateur, j'ai enchainé avec une lecture qui a des gros points communs avec cet ouvrage mais qui en est également un peu son miroir inversé.

Cet essai, qui fait beaucoup parler de lui- plus d'ailleurs que "Sans Oublier d'être heureux"- en cette rentrée 2016, c'est "le Monde Libre" d'Aude Asselin, qui vient de recevoir le Prix Renaudot Essai- alors qu'il ne figurait même pas sur la première liste- et qui raconte également les coulisses du Nouvel Observateur de l'intérieur .
Naturellement, Claude Perdriel- renommé ici Claude Rossignel, car l'auteur prend soin de donner à chaque fois un nom différent à ses protagonistes mais suffisamment proche pour qu'on le reconnaisse- en est un aussi des protagonistes principaux

Sauf que l'être courageux, fort de ses convictions et de ses prises de risque, personnalité proprement fascinante et passionnante chez Marie Dominique Leliève, apparait chez Ancelin comme un industriel plutot lache, qui n'écoute que ce que lui dicte les marchés financiers et ne prend jamais part aux débats d'idées et à la ligne éditoriale de son journal.

Mais Perdriel n'est pas le seul homme de presse à prendre cher dans le récit d'Aude Lancelin, son acolyte Jean Daniel - renommé quant à lui Jean Noël- n'est pas mieux loti, en éditorialiste qui parait complètement désabusé et impuissant face à la dérive de cette presse écrite qui ne cherche même plus à trouver de nouvelles idéees et qui semble totalement abandonner le débat d'idées.

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La presse écrite que décrit Aude Lancelin, ex numéro 2 du journal, licenciée sans ménagement l'an passé, parait tout autant asservie aux annonceurs qu'aux financiers qui possèdent les principaux titres, ainsi qu'à certains pseudos intellectuels (l'image de BHL est particulièreement malmenée) et last but not least à encore hommes politiques ( particulièrement haut placés) qui n'hésitent pas à s'immiscer eux aussi dans les colonnes de ce qui ne semble plus vraiment mériter le nom de quatrième pouvoir qu'on lui a souvent prété .

On est en effet ici très loin de la presse qu'on aime, la presse libre et qui s'affranchit de toutes tutelles, celle que nous présente les films holywoodiens des Hommes du président au récent Spotlight.

Chez Lancelin, la presse parait au contraire constamment musélée, cadenasée, et pareillement complaisante envers le capital et les puissants.

Si le livre d'Aude Lancelin ne dépasse pas toujours le règlement de comptes plein d'amertume, ce qui en fait parfois sa limite, la morale de ce tableau lucide et saisissant d'un monde à la dérive est sans appel : le journalisme d'idées est une menace pour le pouvoir politique en général et l'ascension professionnelle et sociale de beaucoup et doit comme toute être menace réduit au silence...

Dans ce portait au scalpel et sans appel, Lancelin accable encore plus que les autres le nouveau directeur de la rédaction, qui visiblement n'a aucune visée profonde et semble être animé exclusivement par une obsession managériale, et on sent bien que le portrait est sans doute un poil à chargevu que c'est cet homme qui est à l'origine directe de son éviction.

"Les attentats islamistes n'étaient toutefois pas les seuls évènements à redonner à Mathieu Ludeneau quelque gout à la vie du journal. Les catastrophes aériennes produisaient chez lui un effet similaire quuoique de moindre durée. "

Toutefois, ce monde libre reste une lecture essentielle car, au delà du pamphlet et des attaques personnelles on sait gré à Aude Lancelin de parvenir à sonder avec une vraie justesse les errements d'un monde des médias et de la pensée en total déclin.

On aime la façon dont Aude Lancelin décrit minutieusement rouages et coulisses d'un monde qui n'essaie même plus de faire face aux dérives capitalisme et on ferme la dernière page de ce monde libre assez inquiet et déprimé sur l'état de notre monde tant les médias en sont un fidèle miroir..

Et en même temps, on se dit aussi qu'on est finalement pas si malheureux d'être un simple blogueur sans avoir de compte à rendre à personne..
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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