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Critique de Lamifranz


Une supposition, j'dis bien une supposition, que tu m'demandes, comme ça au pied levé, qui c'est, ce mec, Michel Audiard ?

Y a qu'un cave de ton espèce pour poser une question commaque ! Michel Audiard, mon pote, c'est un cador, une épée, un seigneur ! Des comme lui y en a un par millénaire, même en comptant les années bissextiles ! Michel Audiard c'est le roi du porte-plume, l'empereur de la jactance, le Charlemagne des écriveurs du cinématographe !

Eh bien, oui, c'est bien tout ça Michel Audiard ! Acteur, auteur, scénariste, dialoguiste, réalisateur… Il a tout fait dans le 7ème art, et ce qui l'a propulsé au firmament de la célébrité c'est bien sûr la qualité de ses dialogues ciselés avec un mélange d'humour, d'impertinence et de justesse :
Le Narrateur : Voici donc Francis Lagneau, dit « Petit Marquis », dit « Chérubin », dit « Talon Rouge », dit « Falbala », dit « Belles Manières ». Il est également connu, dans certains milieux, sous le sobriquet de « Requiem », dit « Bazooka », dit « La Praline », dit « Belle Châtaigne ». C'est curieux comme les gens sont méchants. (Présentation de Francis Lagneau (Lino Ventura) l'agent secret français dans Les Barbouzes)
Aujourd'hui, il y a des jeunes de vingt ans qui peuvent déclamer des tirades entières des Tontons Flingueurs ou des Barbouzes. Comment expliquer un tel phénomène ? Sinon enconstatant que Michel Audiard est non seulement représentatif de son époque (les années 60 et 70) mais en même temps porteur d'une intemporalité qui, à mon avis est une preuve de la permanence de l'esprit français.
Michel Audiard (1920-1985) est l'auteur d'une dizaine de romans, de quelques recueils de souvenirs ou d'anecdotes, mais c'est bien à son activité dans le cinéma qu'il doit sa célébrité... et sa popularité.
Parmi les quelques cent-vingt films qu'il a scénarisés et/ou dialogués, plus de la moitié ont été, grâce à lui, des succès retentissants, et une bonne trentaine figurent parmi des modèles du genre. Parmi ces derniers, on retiendra particulièrement : Un taxi pour Tobrouk (1960), le Président (1960), le cave se rebiffe (1961), Un singe en hiver (1962), Les Tontons flingueurs (1963), Les Barbouzes (1964), Ne nous fâchons pas (1966), Un idiot à Paris (1967), le Pacha (1968), Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages (1968), Tendre poulet (1978)... et bien d'autres.
Le secret de cette réussite est bien sûr la qualité de son écriture : à la fois très cultivée, et très populaire (la gouaille glisse parfois vers un argot un peu sophistiqué), "au coin du bon sens", d'un humour la plupart du temps caustique, basée souvent sur le contraste entre les personnages, les situations et les dialogues (ce qui crée un décalage réjouissant), et surtout bâtie sur mesure pour des acteurs hors norme . Jean Gabin, Bernard Blier, Lino Ventura, Jean-Paul Belmondo (j'en passe et des meilleurs).
Les Tontons flingueurs représente sans doute la quintessence de l'humour d'Audiard.
C'est l'histoire de Fernand Naudin, commerçant à Montauban ("On ne devrait jamais quitter Montauban") et ex-truand, plus ou moins repenti. Son passé le rappelle quand son ami le Mexicain lui demande d'assurer son entreprise de grand banditisme (prostitution, distillerie clandestine et filouteries de toutes sortes) ainsi que la tutelle de sa fille Patricia. Il faudra bien de la patience à Fernand pour remettre de l'ordre dans la maison, mais il peut compter sur l'aide d'ami fidèles, Maïtre Folace ("Y a que l'argent qui devait rentrer sous huitaine, n'est toujours pas rentré. Y a que l'éducation de la princesse, cheval, musique, peinture, etc… atteint un budget « élyséen ». Et y a que vos dépenses somptuaires ont presque des allures africaines !"), Pascal, le garde du corps ("Monsieur Fernand, y a peut-être une place pour moi dans votre auto, dès fois que la réunion devienne houleuse, j'ai une présence tranquillisante..." ou encore Jean, l'ineffable majordome ("Allons vite, messieurs, quelqu'un pourrait venir, on pourrait se méprendre, et on jaserait. Nous venons déjà de frôler l'incident"). D'autant plus qu'en face, la concurrence est rude, menée par le terrible Raoul Volfoni ("Mais y connaît pas Raoul, ce mec ! Y va avoir un réveil pénible, j'ai voulu être diplomate à cause de vous tous, éviter que le sang coule, mais maintenant, c'est fini, j'vais le travailler en férocité, l'faire marcher à coups de lattes, à ma pogne j'veux le voir ! Et vous verrez qu'il demandera pardon, et au garde à vous…") et la jeune Patricia n'est pas non plus de tout repos ("Patricia, mon petit, je ne voudrais pas te paraître vieux jeu, encore moins grossier, l'homme de la pampa, parfois rude, reste toujours courtois, mais la vérité m'oblige à te le dire : ton Antoine commence à me les briser MENU !")

On pourrait citer chaque réplique, tant elles sont ciselées, adaptées aux personnages,(et aux acteurs) et d'un humour réellement intemporel

Faut pas prendre les Tontons flingueurs pour des Barbouzes sauvages (ou le contraire !)
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