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Critique de Cancie


Les gens de Bilbao naissent où ils veulent raconte la quête de son auteure, Maria Larrea, pour retrouver sa famille biologique. C'est un roman profondément intime qui, par un montage alterné, nous entraîne dans l'histoire d'une famille, la mère, le père et leur enfant, l'histoire de trois destins.
Je dois reconnaître qu'au début, j'ai dû faire un petit effort pour bien suivre l'histoire où se mêlent deux fils narratifs en parallèle, celui de l'enfance de chacun des parents et celui de l'enfance de la narratrice, leur fille.
Cette épopée des origines de Maria Larrea racontée donc par Maria, la narratrice du roman, commence en Espagne, en Galice, en 1947, avec la naissance d'une petite fille Victoria. Sa mère qui voulait un garçon l'abandonne aux soeurs du couvent voisin puis la reprend des années plus tard. Elle aura la responsabilité de ses dix frères et soeurs et devra subir les assauts de son père.
Quatre ans plus tôt, à Bilbao, une prostituée a mis au monde un garçon Julian. Ne souhaitant pas l'élever, elle l'a confié à une institution jésuite, la Miséricorde. Plus tard, pour prendre de la distance avec ce passé misérable, il s'engage dans la marine.
Les années passent, difficiles pour tous les deux, jusqu'à ce soir de la Saint Silvestre, le 31 décembre 1965, où la belle galicienne Victoria est attablée au comptoir d'un bar, sur le port du Ferrol, cette ville où est né Franco, quand entre un jeune marin, Julian. Ils tombent immédiatement amoureux l'un de l'autre.
Tous deux n'ont qu'un souhait, fuir ce passé et le traumatisme provoqué par leur abandon, fuir ces institutions religieuses écrasantes et s'éloigner de cette Espagne franquiste.
Ils rêvent à un avenir plus radieux et partent s'installer à Paris dans les années 70. Julian trouve un poste de gardien au théâtre de la Michodière et Victoria est femme de ménage.
Ils vont avoir un enfant, Maria, la narratrice du roman qui, tout en nous contant l'enfance et la rencontre de ses parents nous fait découvrir sa propre enfance entre ce père basque nationaliste, l'ETA étant sa seule religion, ce père devenu alcoolique et violent et sa mère résignée, aux senteurs d'eau de javel.
Maria doit faire face aux moqueries de ses camarades issues d'un milieu social plus favorisé : « À chaque moment de mon existence, l'infamie de ma naissance m'était rappelé ». Elle éprouve honte et colère. Elle avance pourtant et n'a qu'une certitude : faire du cinéma et réaliser.
Devenue adulte, diplômée de la Femis, mariée à Robin et mère à son tour, elle est cependant en proie à un mal-être mystérieux. Elle va alors, à 27 ans consulter une tarologue qui lui suggère : « Ton père n'est probablement pas ton père » et elle conseille à Maria de vite parler à sa mère qui doit lui cacher des choses.
Pour Maria c'est un plongeon dans un bain glacé et elle va entamer alors une stupéfiante quête de ses origines. Démarre ainsi la deuxième partie du roman dans laquelle elle mène son enquête entre Paris et Bilbao, la ville où elle est née pour tenter de percer le mystère de sa naissance.
Ce qui au début paraissait être un simple récit autobiographique prend soudain une autre dimension avec une allure d'enquête policière.
Dans cette autobiographie romancée, au cours de son questionnement sur ses origines, Maria Larrea évoque de nombreux thèmes que ce soient les non-dits, les questions de filiation, l'adoption, les recherches généalogiques. Elle décrit avec talent les conditions de vie de ces immigrés espagnols, leur mal du pays et leur difficulté d'intégration entraînant chez certains ce sentiment de déchéance qui les conduit parfois à recourir à l'alcool. On y croise Franco. On découvre Bilbao. Il y est également question de l'Opus dei, des bébés abandonnés et des agissements de l'église catholique, de l'ETA…
Grâce à une écriture enlevée, énergique, très imagée, frisant parfois le burlesque mais aussi le tragique, des scènes picaresques, un scénario haletant Maria Larrea nous offre un premier roman fort réussi. Il est une puissante réflexion sur la famille, sur ce que sont les liens du sang et les liens affectifs.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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