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Critique de Henri-l-oiseleur


Cette anthologie de littérature occitane médiévale existe désormais en un seul volume, je crois, mais je ne parlerai que de celui-ci, consacré à la poésie, car il est le seul que j'aie en rayon, depuis de très longues années. René Lavaud était un grand médiéviste, et René Nelli, qui signe l'ouvrage avec lui, a beaucoup oeuvré pour faire connaître et découvrir l'ancienne civilisation des pays d'oc, Cathares inclus.

Lire de la poésie médiévale, surtout lyrique (l'épopée, ancêtre du roman, est autre chose), est une entreprise frustrante pour le lecteur contemporain. On s'attendra, dans le lyrisme, à des sentiments, à des choses vécues, même à des confidences ; on cherchera dans la parole poétique non seulement l'émotion partagée, mais la beauté formelle où chaque auteur signera son oeuvre par une création originale, un style particulier et personnel.

Rien de tel ici : comme l'a bien montré Paul Zumthor, la lyrique médiévale ne se consacre qu'à l'expression de sentiments extrêmement codifiés, et l'on ne trouvera rien de vécu, rien de "sincère" ni d'individuel, chez les troubadours. Si par exemple la châtelaine de Die écrit des poèmes d'amour pour une femme, ce n'est pas parce qu'elle aime les femmes, mais parce que la rhétorique poétique l'exige. le lecteur ira donc au-devant d'une déception à lire ces poèmes, à moins d'avoir une teinture de catalan ou d'occitan ancien, puisque la splendeur de cet art est essentiellement verbale, métrique, rhétorique. Tout est dans la langue. Les troubadours, un peu comme les jazzmen, disposent d'un stock limité de situations et de thèmes, et on les juge selon leur virtuosité à jouer de la langue, à "interpréter" le thème attendu. La seconde partie du volume, où l'on trouvera des poèmes de guerre, des épopées, des passages romanesques et des satires, fera un tout autre effet et rendra (pour les satires) un son peut-être plus familier à nos oreilles.

Pourquoi donc lire ce livre ? Ces poèmes ont fait l'admiration de Dante (qui, dit-on, songea à écrire sa Divine Comédie en occitan), T.S. Eliot, d'Ezra Pound, très grands poètes qui nous citent, imitent, révèlent ces troubadours et nous les font voir par le prisme de leur génie propre.
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