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Critique de Michel69004


"Love is a warm bearing wave"

J'aurais aimé aimer ainsi. J'aurais aimé écrire ainsi.
C'est sans doute cela la nostalgie, se souvenir de ce qui n'a pas eu lieu.
Une plume d'une délicatesse infinie caresse les plages venteuses de la Baltique, dessine l'île aux oiseaux, retient les amours pudiques, chromatise tendrement les immenses étendues de sable blond. Un plume rendue aux goélands, aux cormorans.
Christian, 18 ans, devient l'amant de la belle Stella, sa professeure d'anglais. Nous sommes au début du siècle quelque part sur une côte touristique de la Frise du nord. C'est l'endroit parfait pour une romance sépia, pour une romance salée.
Du déjà écrit, du déjà vu me direz vous ! Oui et non.
Oui pour l'histoire qui, comme vous le savez, se terminera tragiquement. Car tout commence par une véritable minute de silence pour honorer la mémoire de Stella Petersen, morte en mer dans de bien étranges circonstances. Les professeurs et les élèvent se recueillent. Christian, figé dans sa douleur, refait l'histoire dans sa tête, une histoire brève et éphémère, légère comme l'écume des âmes et puis rendue à la mer dans l'épouvante d'un champ de pierre. Il n'a même pas pu prendre la parole car c'est dans les non-dits que s'est tissée la tendresse et puis le reste.
Tout ça était couru d'avance, on l'a lue mille fois cette histoire d'amour entre un môme de 18 ans et son enseignante. Que nenni mes amis.
Siegfried Lenz écrit ce court texte alors qu'il a 82 ans. C'est un auteur prolixe, peu traduit en français. C'est un orfèvre. Il soupèse chacun de ses mots pour provoquer chez le lecteur un sentiment de grâce, un ressenti soyeux et merveilleux, avec l'élégante pudeur des grands façonneurs.
Roman d'initiation donc mais pas seulement. Animal Farm d'Orwell, tient dans ce récit une place importante, tout comme le récit du père de Stella qui, prisonnier des anglais devint ami avec l'un d'eux.
On comprend alors que Une minute de silence est d'un profond humanisme, qu'il fait du bien et qu'il apaise.
Je pourrais me faire mouette dans le sillage des amants, virevolter et rire comme le font ces oiseaux. Mais je préfère me faire miroir de l'opale baltique, refléter l'incroyable beauté de ces pages humbles et joyeuses, bercées par le va-et-vient du ressac, du "tu" et du "elle", du présent et du passé.
Restent quelques photos et la nostalgie des coeurs meurtris.
Ce livre magnifique est à lire doucement, tranquillement avec évidemment un brin de vague à l'âme.
Il vient à point nommé.
Lumineux.
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