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Critique de Noctenbule


L'histoire se retrouve dans le titre court et efficace de ce roman Suicide d'Edouard Levé. le thème de la mort n'est pas toujours une thématique facile à aborder. L'auteur ici décide de servir une histoire tout en douceur pour parler d'un dernier voyage celui d'un ami et surement du sien.

Le roman commence de façon directe et sans fioriture. "Un samedi au mois d'août, tu sors de chez toi en tenue de tennis accompagné de ta femme. Au milieu du jardin, tu lui fais remarquer que tu as oublié ta raquette à la maison. Tu retournes la chercher, mais au lieu de te diriger vers le placard de l'entrée où tu la ranges d'habitude, tu descends à la cave. Ta femme ne s'en aperçoit pas, elle est restée dehors, il fait beau, elle profite du soleil. Quelques instants plus tard, elle entend la décharge d'une arme à feu. Elle accourt à l'intérieur de la maison, elle crie ton nom, remarque que la porte de l'escalier qui conduit vers la cave est ouverte, y descend et t'y trouve. Tu t'es tiré une balle dans la tête avec le fusil que tu avais soigneusement préparé." le ton et le sujet est donné.

L'ami de l'auteur s'est suicidé en ne laissant qu'une bande dessinée ouverte sur la table du salon avant de se tirer une balle dans la tête. Doucement, il parle de cet homme comme un proche puis doucement des détails très personnels sont donnés jusqu'au ressenti. Ne parlerait-il pas de lui? le sujet de la mort de son ami n'est-il pas une façon de laisser sa propre de lettre de suicide? Car dix jours après avoir déposé son manuscrit à son éditeur il décida de mettre fin à sa vie. Son mal-être ou celui de son ami devint trop difficile à gérer et seul la mort peut soulager.

D'une façon décousue, il délivre ces pensées comme elles lui viennent de l'esprit. Il nous fait de la passion pour la lecture : "Tu lisais debout dans les librairies plutôt qu'assis dans les bibliothèques. Tu voulais découvrir la littérature d'aujourd'hui, pas celle d'hier. Aux bibliothèques le passé, aux librairies le présent. Pourtant, tu t'intéressais plus aux morts qu'aux contemporains. Tu lisais surtout ceux que tu appelais "les morts vivants" : des auteurs défunts que l'on continue de publier. Tu faisais confiance aux éditeurs pour actualiser aujourd'hui le savoir d'hier. Tu croyais peu aux découvertes miraculeuses d'écrivains oubliés. Tu pensais que le temps trie, et qu'à ce titre, il valait mieux lire des auteurs du passé publiés aujourd'hui que des auteurs d'aujourd'hui qui seront oubliés demain." le voyage ou le non-voyage, car il aimait imaginer ce qu'il pouvait découvrir que le voir de ces yeux : "Tu aimais les lieux ouverts au public où personne ne s'étonne que l'on s'attarde, immobile au milieu du flux citadin. La foule garantissait ton anonymat". Où avant quand il partait à l'étranger, il s'invitait chez des gens pour s'imprégner d'une autre culture : "Loin de chez toi, tu goûtais au plaisir d'être fou sans être aliéné, d'être imbécile sans renoncer à ton intelligence, d'être un imposteur sans culpabilité."

Mais un je ne sais quoi altérait son humeur, le poussait à voir la noirceur sans qu'il y ait forcement une raison. "Rien ne justifiait pourtant ta crainte. Tu n'étais pas solitaire, pauvre, alcoolique, abandonnée. Tu avais une famille, une femme, des amis, une maison. Tu ne manquais pas d'argent. Mais les clochards étaient comme des spectres annonciateurs d'une de tes fins possibles. Tu ne t'identifiais pas aux gens heureux, et dans ta démesure, tu te projetais dans ceux qui avaient tout raté, ou rien réussi. Les clochards incarnaient le stade ultime d'un déclin vers lequel ta vie pouvait tendre." Il est bien difficile de comprendre l'être humain. Grâce à ce livre, l'auteur a voulu laisser une trace pour ces proches.

Un livre qui ne peut pas laisser indifférent aussi bien dans la forme que dans le fond. Les pages se tournent bien grâce au style léger et authentique que l'auteur utilise. Malgré les idées noires et quelques loufoqueries, je me suis attachée aux personnages de ce roman, bouleversant d'authenticité. On croirait qu'au vu du titre, on va tomber sur une histoire où le paquet de mouchoirs soit indispensable. Toutefois, il ne sert à rien. Ici pas de sentiments trop exubérants ou larmoyants et cela ne servirait en rien l'histoire. Un récit terre à terre, touchant par un vocable riche et imagé tout en étant très réaliste.

Un coup de coeur de lecture qui surprend et qui marque par sa vraisemblance. Il va se diriger dans ma bibliothèque pour y trouver sa vraie place parmi les bons romans. Une envie forte se fait à découvrir les précédentes écritures de cet auteur étonnant.
Lien : http://22h05ruedesdames.word..
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