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Critique de roquentin


Elmer Gantry, Sinclair Lewis
Ecrit en 1927, ce livre a provoqué un choc retentissant dans cette Amérique de l'entre-deux guerres. Celle qui à la fois, sort de la Reconstruction post Guerre de Sécession, sort comme nation triomphante de la 1ere Guerre Mondiale, mais qui lentement entre dans le marasme économique dû à un capitalisme échevelé qui mange trop vite son propre profit.
Elmer Gantry fait partie de cette galerie de portraits que dresse Sinclair Lewis au long de son parcours d'écrivain (Babbitt, Main Streets…). Elle expose des personnages simples, aux aspirations simples et louables mais qui se font aspirer par la cupidité et l'appât du gain, sacrifiant en cela toute retenue morale. Elmer Gantry est sans doute le roman emblématique de cette galerie.
Le livre met en scène un étudiant pas très appliqué, vaguement bon en sport, se demandant ce qu'il fait là, comme il y en a tant « là-bas ». Elmer est beau gosse, beau parleur, doté d'une belle voix de baryton. Il aime courir le jupon, errer de bar en bar, de fête en fête. Au détour d'une rencontre, il entre dans le cénacle des prêcheurs de la Bonne Parole de Dieu. Cette allégeance n'est pour Elmer Gantry, personnage éponyme du roman, qu'un moyen comme un autre pour se remplir les poches. Et il ne s'en privera pas …
Cela le transformera en Tartuffe. L'hypocrisie est à son paroxysme, Gantry ment et manipule sans vergogne. Et pour cause, l'Amérique de la Religion est une constellation de congrégations. Baptiste, congrégationniste, presbytérien, méthodiste, ne me demandez surtout pas les différences entre ces courants de la religion protestante, mais Elmer Gantry passera de l'une à l'autre, à chaque fois qu'il se fera virer de l'une d'elles. Au détour de ses pérégrinations, il fera équipe avec une Sharon Falconer, à laquelle il s'associera pour extorquer les gens à plus grande échelle tout en s'adonnant au stupre « après les heures ». C'est un très bon personnage de ce livre. Avec elle, il valsera sur la crédulité américaine, dans ces années marquées par la disparité d'une société.
Une seule personne parviendra à le percer à jour et lui posera la question « Quand, mon fils, as-tu cessé de croire en Dieu ? » Cet homme, un vieux pasteur, n'imagine même pas le pire, le vrai : Gantry n'a jamais commencé à croire de sa vie. Inutile de préciser que se voyant mis à nu, Elmer s'éloignera fissa de son tourmenteur.
Cela me conforte dans mon concept de la religion : il y a la Foi, puis il y a les hommes qui la colportent…
Lewis dénonce ce monde fait majoritairement d'imposteurs et de semeurs de peur qui très vite a monnayé la simplicité d'âme des plaines, prairies et petites villes modestes du Midwest. En attaquant ce système, Sinclair Lewis a affronté la religion et ses représentants eux-mêmes. Il s'est fait des ennemis puissants, mais cela ne l'a empêché d'emporter le prix Nobel de nature en 1930, heureusement décerné en Europe.
Aux Etats-Unis, Lewis a encore publié un livre en 1929 (Sam Dodsworth) avant son Nobel. Mais ses adversaires avaient fourbi leurs armes et n'attendaient que le succès très mitigé de ce dernier opus pour le discréditer et précipiter la fin de la carrière de Sinclair Lewis.
Le livre est facile à lire, Bien rythmé car il y a beaucoup de dialogues. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, le style n'est pas daté, même si esthétiquement, cela ne représente pas grand-chose.
Il y a cependant quelques très bons personnages. Elmer lui-même, Sharon Falconer, Jim Lefferts qui tente de le retenir de s'avilir avec ce commerce, le Pasteur clairvoyant, Shallard, prêcheur devenu infidèle puis athée.
Vous aurez compris que l'oeuvre vaut surtout par le sujet traité et par la place qu'il occupe dans la littérature US.
Je suis toujours fasciné par ces êtres capables de s'enrichir sur la naïveté des concitoyens, donc ce livre m'a plu, même s'il ne figurera pas parmi mes livres-phare de 2022.




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