Peu avant de s’endormir, il eut l’impression de mesurer pour la première fois la gravité de ce qui se passait. Un âge nouveau s’annonçait, un âge nu qui promettait de durer et dont le mot-clé serait « sans », de la même façon que le précédent avait été « avec ».
Depuis sept ans, si on exclut des lettres qui n'ont jamais obtenu de réponse, je n'ai pas écrit une ligne, mais cela ne m'a pas empêché d'habiter les terres de mes livres et celles des livres des autres.
C'était la douloureuse vérité qu'il avait dû admettre depuis longtemps, au moins vis-à-vis de lui-même : la vie jaillissait du gaspillage, pas de la parcimonie, du hasard, pas du calcul, et toute création était le fruit d'un geste téméraire sans lequel il n'y aurait que répétition. L'histoire et les progrès de la civilisation avaient été une longue tentative couronnée de succès de rassurer les hommes doux et peureux, en camouflant cette terrible hypocrisie derrière l'impératif de la logique, de la morale et de la beauté. Avec son métier, ses livres, son long corps maigre dépourvu d'agressivité, il n'était que l'ultime produit de cette avancée : un napperon de dentelle insipide, habilement crocheté, fait pour attirer la poussière et les compliments sur la commode d'une vieille tante.
Peu avant de s'endormir, il eut l'impression de mesurer pour la première fois la gravité de ce qui se passait. Un âge nouveau s'annonçait, un âge nu dui promettait de durer et dont le mot-clé serait "sans" , de la même façon que le précédent avait été "avec" .
"L'après-midi, il dormait de ce sommeil paisible et réparateur, qui, en général, suit, et non précède, un événement capable de changer le cours d'une vie."
Leonardo comprit que l'esprit de l'enfant concevait une de ces pensées qui accompagnent un homme depuis l'instant ou il naît jusqu'à celui où il quitte cette terre. Elle concernait la fin d'un besoin qui nous a été transmis par ceux qui nous ont précédés. Il resta sans voix devant la violence et la grâce dont cet instant était nimbé.
Les pensées se bousculaient dans sa tête. des pensées qui tournaient autour de la mort, de l'indignité, du courage et de la possibilité de forcer sa propre nature. ce n'étaient pas des pensées dont il espérait tirer le moindre soulagement, mais il savait qu'il devait les affronter.
Quand on est jeune, on est capable du meilleur comme du pire. Il en faut peu pour
pencher d'un côté ou de l'autre.
Quand il sortit en fermant la porte derrière lui, il savait qu'il ne la rouvrirait plus jamais. Il avait huit livres sous le bras. Il aurait pu en emporter davantage, mais il avait choisi de s'arrêter à huit
Leonardo alla voir la pièce des livres. La porte avait été forcée. Il entra , suivi de Bauschan, alluma. Toutes les étagères renversées, l'endroit paressait plus grand. Il y régnait une forte odeur d'essence.