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Critique de HK


HK
16 janvier 2012
Si l'on peut reprocher à Lovecraft un abus quasi systématique de l'emphase, il faut lui reconnaître une imagination débordante. « L'affaire Charles Dexter Ward » appartient aux oeuvres qui marquent ses lecteurs non pas par son style, mais plutôt par la richesse de son contenu. Naviguant souvent dans les eaux troubles de l'invraisemblance, Lovecraft parvient cependant à ferrer ses lecteurs par ses descriptions minutieuses contribuant à valider son récit. Grâce à des coupures de journaux, des lettres, des comptes rendus détaillés, le lecteur le plus sceptique en viendrait même à douter de la fausseté des faits parfois peu crédibles qui lui sont exposés.

Mais ce n'est pas la seule réussite du maître. Car, malgré un début tonitruant, on ne constate ensuite aucune baisse de régime. Au contraire, le suspense continue de monter crescendo, nous menant dans les plus hautes sphères de l'horreur. Pour ce faire, le récit s'appuie sur une structure bien étudiée. Ainsi, un puzzle cauchemardesque va se complèter peu à peu sous nos yeux et chaque pièce nouvelle viendra s'y insérer parfaitement. Jamais, donc, Lovecraft ne desserre son étreinte. Car, sans cesse, une nouvelle révélation vient rendre l'intrigue encore plus inquiétante qu'elle ne l'était déjà. le climax, qui arrive lorsque le docteur Willett explore la cave de la maison Curwen, illustre d'ailleurs ce principe à merveille. Chaque découverte supplémentaire du praticien attise un peu plus la curiosité morbide du lecteur, qui pris au piège, est contraint à tourner fébrilement les pages pour en apprendre d'avantage.

L'utilisation d'un pole narrateur constant se fait bien entendu au détriment de certaines choses. Les personnages par exemple en sont réduits à leur plus simple expression. Juste une vague description physique et au mieux un profil psychologique superficiel les définissent. En réalité, ils campent les témoins des faits fantastiques que Lovecraft veut nous faire vivre. Cela aurait pu poser un problème d'identification, d'empathie dans le cas d'un roman de terreur psychologique. Mais tel n'était pas le but de Lovecraft, qui par ses nombreuses descriptions, sa topographie et chronologie rigoureuses, visait surtout à embarquer ses lecteurs dans une odyssée de terreur matérielle. D'ailleurs, il ne s'aventure jamais à instiguer le doute. Les faits aussi étonnants soient ils, ne trouvent ainsi jamais d'explication dans l'état mental déficient de celui qui les vit. Et si il persiste tout au long du récit certaines zones d'ombre, il n'y a qu'une seule piste de lecture autorisée.


Ayant été un fervent admirateur de Lovecraft durant mon adolescence, je le redécouvre bien des années plus tard. Je m'attendais à être déçu car, souvent, les goûts de jeunesse paraissent bien frivoles une fois la maturité acquise. Je dois évidemment reconnaître mon erreur car Lovecraft demeure un grand maître de la littérature fantastique et il ne fait aucun doute que sa puissance évocatrice continuera de traverser les âges et de fasciner des générations entières de lecteurs.

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