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Critique de Seraphita


1986. Sept ans après la révolution iranienne, Maryam, 6 ans, et ses parents fuient l'Iran pour se réfugier en France. C'est le temps de l'arrachement à une terre et ses souvenirs, à sa langue et sa culture, qui va hanter la mémoire de Maryam, l'amener d'abord à renoncer radicalement à ses origines pour se fondre pleinement dans la langue et la culture françaises. Mais au fil de sa maturation, la terre de ses origines, son sel, lui manquent pour pouvoir grandir pleinement, se sentir entière. Alors elle se questionne sur la langue qui fonde son identité et va chercher à déterrer « ses racines dans [un] terreau qui ne sent plus le passé mais l'avenir ».

« Marx et la poupée » est un magnifique roman écrit par Maryam Madjidi en 2017 et qui a été récompensé cette même année par les prestigieux prix Goncourt du premier roman et Ouest-France Etonnants Voyageurs. Entre fiction et autobiographie, c'est un roman polymorphe, déroutant parfois au niveau de la narration, empli d'une sensibilité jusqu'au bout des mots.
Par allers retours successifs, Maryam conte son histoire, celui d'un exil forcé depuis l'Iran jusqu'en France. Elle narre la violence du déracinement, la perte des repères, le regard des autres qui la force à une normalisation bien illusoire. Au coeur de l'exil et de l'intégration à une autre terre, la langue, les langues constituent le point nodal de sa construction. En trois actes, « Marx et la poupée » déroule cette épiphanie des langues, depuis l'oubli volontaire par Maryam de sa langue maternelle afin d'assimiler le français et de se fondre entièrement dans la population, jusqu'au désir de retrouver le terreau des origines, la langue maternelle qui l'a construite et modelée. Trois actes de naissance ponctuent donc le temps de cette complexe épiphanie qui vient dire la difficile construction de soi dans l'exil, hors-sol.
Le trait d'union que Maryam inscrit entre ses deux langues qui la nourrissent, c'est celui que la poésie apporte, dans sa créativité, la richesse de ses messages et sonorités. Et elle vient, en miroir, nourrir le lecteur de ses créations littéraires variées : tantôt quelques contes, tantôt des poèmes qu'elle suspend sur le fil de son existence dont elle déroule ici le récit.
Ce trait d'union qu'elle inscrit, quelle que soit la langue, et qui rejoint chacun en son humanité, c'est celui du souffle, de la vie qui se poursuit quoi qu'il en soit des douleurs qui en jalonnent le chemin.
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