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Critique de DianaAuzou


Les Fables OAlexandre Majorczyk

J'ai reçu un beau cadeau, sensible et touchant : de la poésie, les Fables O d'Alexandre Majorczyk. Fables O, onomatopéique, origami, outre-tombe, trois fois oh, le mien, devant un canevas de tristesse vêtue de fraîcheur, habit que les vers tissent pour en faire un rythme des plus légers, des images que la mémoire seule en retient et partage avec qui voudrait bien l'écouter.
Je l'ai fait et j'en sors légèrement grisée.

« Il était une fois, un petit bois
Peuplé de grands arbres blancs
Comme l'ivoire de ces éléphants
Disparus, dont l'écho sonne encore le glas…

Et non loin de là…
La demeure semblait solitaire, un côté vide…
Fantomatique vision...
Sa façade était peuplée de toiles d'araignée.
Plus personne n'y habite,… »

Je deviens moi-même fantôme errant à la rencontre de ceux qui hantent la maison, mes yeux rejoignent les cimes d'un arbre majestueux  et me sens intimidée par sa « sage vieillesse » et par cet imparfait que l'auteur utilise, un passé qu'il regarde vivre, autrefois.
La marque du temps qui avait déposé sa longue mantille chargée d'années emmêla la barbe de l'« ancien lutin », il n'était pas content Zegarrdenn.
Le voyage se poursuit sur les ailes invisibles du temps, l'imparfait, incomplet, inachevé, m'entraîne sur le chemin d'un bouffon qui paya cher ses cabrioles et blagues « Car l'humour est affaire des sérieux ».
Les fantômes connaissent bien son ombre et sa faux mais ils s'en moquent maintenant éperdument, elle ne leur fait plus peur « L'esprit s'esclaffa,
Sardonique : « pathétique... »
Voilà tout ce qu'il en pensa,
Un dernier regard oblique... »

« Le voleur d'âme, au bâton famélique », est toujours présent, son « esprit inassouvi » a toujours faim, « comme un cri »…, mais le lutin revient pour me montrer le chemin et prêter compagnie à un âne qui fait un coup de sabot au voleur d'âmes,
« L'âne était déjà un peu récalcitrant
Après tout c'est un animal têtu .»
Onomatopées sonnantes d'un glas qui revient sans cesse têtu lui aussi, imperturbable, ricaneur, et un imparfait, comme un passé continu se déroulant sans arrêt, sans fatigue, une période révolue qui revient toujours, un décalage avec la réalité ?, mais non c'est juste une attitude très particulière devant ce qui nous fait froncer les sourcils et une tendre affection pour son contraire.

Des années plus tard, la Fable origami arrive en vol léger sur des ailes plumées « de blanc et d'argent ». le stylo peine à trouver les mots pour « effacer tous les tourments », et peut-être jalouse-t-il les « ailes libres au vent », et peut-être « leur en veut-il ?,
Au fond du fauteuil roulant
Signant son confinement ? »

Plier, plisser, déplier des ailes en papier, plier son corps et attendre… peut-être, un nouvel envol… Il se laisse soigner « de manière
À croire une chimère… »
Origami, plier déplier le papier qui se laisse faire… le corps est fatigué, n'oppose plus de résistance, le carré devient triangle, se plie à nouveau, les ailes se pointent prêtes à battre l'air, le papier prend vie, le corps aussi, le souffle revient
« Et réincarner
Le bec, les ailes arquées…
Ailes déployées . »

Fable outre-tombe. J'imagine les vieux fantômes se mêler avec nos âmes en sursis dans un avant et outre tombe sans frontière, où les musiques célestes écoutent Led Zep' et leur Stairway To Heaven, où « Les âmes s'étirent,
Se compriment en accordéon,
Répulsent, s'attirent,
Pulsent depuis d'infinis éons...
Le temps n'existe pas,
Dans ce temple, allégorique. »

Avant qu'elle arrive, qui « N'est qu'à un étage du bonheur,
Parfois à un autre du malheur. », le poète fait son voeux :

"Que je puisse écrire
Encore des vers enrubannés,
Pour qu'ils en inspirent
Des auteurs, qui aimeraient flâner
Dans les hauts herbages
D'un jardin d'éden... »

Fantastique, surréaliste, les pieds plantés sur terre et la tête dans un nuage, vibrante et envolée, la poésie d'Alexandre Majorczyk accueille rêves et cauchemars, espoirs et désillusions avec la force et la gourmandise du vivant qui a connu la maladie et l'a combattue.


Merci Gabrielle.
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