Lorsque l'homme prend conscience de l'immensité de la terre, dit-elle, des infinies contrées qu'il ne connaîtra jamais, de tous les livres qui peuplent les bibliothèques du monde et qu'une vie entière ne suffit pas pour lire, alors il réalise la petitesse de son destin, l'absurdité de l'existence. En une seule journée, j'ai téléchargé dans mon ordinateur plus d'heures de musique que je n'écouterai jamais. Et pourtant, jour après jour, j'engrange, je compile. Pourquoi ? C'est une manie stupide, propre à ma génération. Toutes les possibilités sont offertes, des millions de musiques, de films, de livres, d'images, et le temps qui est compté. Voilà la contradiction de notre époque. Je voudrais tout entendre, tout lire, tout voir. Et s'engager dans cette folie boulimique ne fait qu'ajouter à la dispersion. Car on finit par éprouver le sentiment étrange de ne plus rien comprendre au monde dans lequel on vit. Nous rêvons d'en saisir la quintessence, mais c'est l'illusion qui triomphe.