AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de maroussia29


Bienvenue en France

A Versières, la Cité noire, un jeune beur au pédigrée douteux est retrouvé mort, après une course-poursuite. Dans le contexte d'une France frappée par les attentats terroristes et la montée de l'anti-islamisme, l'événement fait grand bruit. Tandis que la victime se mue en martyr des banlieues abandonnées par l'État, le commissaire Meheut, flanqué de sa stagiaire, mènent l'enquête. Il faut trouver un coupable. Et vite. Mais qui est coupable ? Qui est victime dans cette histoire ? Qui a fait quoi ? Un vrai sac de noeuds. Qu'importe, la mécanique implacable du bouc émissaire se met en place : elle sacrifie un agent de la paix, à peine plus âgé que la victime. Il est mis fissa en examen (la justice française a à coeur de punir les coupables de crimes racistes) avant d'être disculpé (la justice française a à coeur d'être juste, aussi).

La structure chorale du roman permet de faire entendre, tour à tour, les voix de la police, des politiques, de la justice, de la famille, de la presse et des instances médiatrices, toutes actrices de ce drame, et de confronter leurs points de vue. Dans ces soliloques déguisés en dialogues, les narrateurs vocifèrent plus qu'ils n'exposent ou ne pensent, freinés dans leur enquête par des bras invisibles qui les laissent blasés et impuissants. Ne restent plus que les égos et les intérêts particuliers, qui se heurtent dans un micmac nauséeux. Dans ces querelles de clochers incessantes, la vérité, quant à elle, peine à émerger. Pire, elle se noie.

Il y a quelque chose de pourri au royaume de France. le style, tout en verve et en ironie – jusqu'à la caricature, parfois – dresse au final la satire d'un pays qui n'est fait que de façades : celle peu reluisante des banlieues dans lesquelles on ne s'aventure qu'avec prudence ; celle des bureaux feutrés du Quai des orfèvres ou des ministères dans lesquels on pénètre selon tout un cérémonial ; celle des familles où l'on s'évertue à cacher des secrets ; jusque celle des alcôves où les humeurs s'évacuent sans âme ni plaisir. Mine de rien, ça balance sec sur les arcanes labyrinthiques du pouvoir et de la justice : « l'hypocrisie française dans toute sa splendeur » (p. 241)

Bienvenue en France. Bienvenue dans l'ère où tout le monde est suspect…
Commenter  J’apprécie          10



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}