Si seulement je n'avais pas déconné au lieu de me tirer une balle dans le pied, je pourrais savourer ce que j'avais été capable de faire, de diriger, de construire. Je me dirais que j'avais un avenir, que j'allais pouvoir réaliser les rêves de Véra et des enfants. Au lieu d'entrer dans le concept store comme un zombie qui rase les murs, je serais entré comme un cador.
Pourtant, cette maison me mettait mal à l'aise, sans que je puisse mettre le doigt sur les raisons de cette sensation, j'avais un noeud à l'estomac depuis notre arrivé. Tout me semblait vieux, sombre, comme si une ombre planait au-dessus de nos têtes.
Elle sortit en tenant ses enfants contre elle tendrement, ses pas avaient retrouvé leur légèreté, elle sautillait, aérienne, vers l'homme qu'elle aimait, lui jeta son mégot dans le caniveau et accourut vers elle. Elle lâcha ses enfants pour qu'il puisse la prendre par la taille. Il la fit tournoyer autour de lui. Elle riait, aux anges. Il se laissa hypnotiser une dernière fois par la mélodie de leurs voix, de leurs rires, par l'harmonie des mouvements de sa robe colorée autour de ses jambes.
Il avait sous-estimer le pouvoir de leur amour.
Il avait violé notre vie, et si je ne voulais pas que la situation vire davantage à la catastrophe, il fallait que j'assiste en spectateur à la fin de notre famille.
"Votre vie, quoi que tu en penses, change, commença-t-il sérieusement. Yanis change. Tu changes, Véra. Dans ces moments-là, on fait du tri, on s'éloigne de personnes qui ont énormément compté parce qu'on ne partage plus les mêmes centres d'intérêt. Vous allez nouer de nouvelles relations avec Yanis, toi la première. Ca n'ôte en rien l'affection que tu as pour tes vieux amis, ni celle qu'ils ont pour toi".
On est toujours partis du principe que le jour où on arrête de se parler, c’est le début des emmerdes.
Mais tu sais,peut-être que ça existe encore des gens gentils qui ne cherchent pas à te planter et qu'on est tombés sur quelqu’un comme ça avec Tristan.
L'ampleur de la situation venait de m'exploser à la figure.Je m'en voulais terriblement de n'avoir rien vu.En réalité,j'avais fait l'autruche.Désormais,je m'en mordais les doigts.
Nous connaissions chaque parcelle de nos corps, nous savions quel geste, quelle caresse ferait frémir l’autre, et pourtant à chaque fois que nous faisions l’amour, nous explorions une nouvelle facette, un nouveau plaisir. Nous redécouvrions la connaissance que nous avions de l’autre et de ses désirs. La peau chaude des mains de Yanis, alliance de callosité et de douceur, me faisait toujours tressaillir, trembler, ses baisers provoquaient toujours autant de musique dans ma tête et mon cœur. Il regardait avec un mélange d’adoration et d’admiration mon corps marqué par mes trois grossesses. Pour lui, mon ventre qui ne serait plus jamais plat, mes hanches plus larges, les quelques vergetures et mes seins moins volumineux depuis que j’étais maman m’avaient rendue plus attirante encore à ses yeux, plus sexy. Il me rendait belle.
Repus d’amour, somnolents, dans les bras l’un de l’autre, nous luttions contre le sommeil. Comme pour faire durer la magie de la journée.