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Critique de frandj


Voici une biographie qui sort de l’ordinaire, signée par Jean Massin plus connu comme musicologue que comme historien. Elle concerne une figure très spéciale et pourtant très connue de l’histoire de France. Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, Robespierre est probablement le seul révolutionnaire français dont tous les citoyens connaissent le nom. Et pourtant, la plupart des historiens n’ont pas fait sa pub' et l’on ne trouve pas beaucoup de rues portant son nom !
Eh oui, cet homme d’Etat exceptionnel incarne, mieux que tout autre, le régime de la Convention et… surtout la Terreur. C’est là où le bât blesse ! Cet homme parfaitement honnête, idéaliste, fidèle à ses idées jusqu’à la mort, a dû affronter une situation d’urgence avec la plus grande fermeté. Inspirateur principal du Comité de Salut Public, il a mené une politique de répression contre les opposants à la République pure et dure qu’il voulait instaurer. « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté »: cette maxime, attribuée à Saint-Just, Robespierre aurait pu la dire aussi. Tout le problème est là: au nom de leur "bel" idéal, les dictateurs ont-ils le droit moral de réprimer impitoyablement les opposants à leur projet politique ? Eux, ils répondent évidemment oui. Et ce que Robespierre et ses amis ont expérimenté à "petite" échelle (avec des justifications ampoulées...) pendant la Révolution française, plus tard Staline et les Khmers rouges l’ont réalisé (sans le moindre scrupule) à grande échelle. Tout ça pour quoi, en définitive ? pour revenir sensiblement au point de départ ! En effet, après la chute de Robespierre, les Thermidoriens ouvriront la voie à Bonaparte; de même, la Russie était (théoriquement) déstalinisée dès 1956, avec le rapport Khrouchtchev !
Bien entendu, J. Massin n’est pas sur cette longueur d’onde ! Il défend l’homme Robespierre, resté simple et incorruptible; il défend le politique intègre qui affronte sans détours les problèmes et s’oppose aux ennemis de la Révolution; il défend l’intellectuel, le grand orateur qu’il fut; il tend à minimiser les effets de la Terreur. Pourtant, les historiens admettent aujourd’hui que, en 16 mois, 17 000 personnes furent guillotinées et plus de 20 000 mises à mort d’une autre façon, sans compter les victimes civiles de la guerre contre les Vendéens: ce n’est quand même pas rien, même si Staline a été plus "performant" !
L’auteur fait un récit minutieux de la carrière politique de Robespierre et donne souvent de longs extraits de ses discours à la Convention; c’est souvent fastidieux, d’autant que l’art oratoire de l’époque diffère sensiblement de notre langage actuel. Il montre son rôle de cheville ouvrière dans le Comité de Salut Public. Il ne cache pas la complexité des rapports de force au sein de la Convention. Enfin, il raconte la fin lamentable de son héros, politiquement maladroit au moment critique, blessé à la mâchoire lors de son arrestation, puis guillotiné presque aussitôt. Exit Robespierre... Il reste quelque part dans notre Histoire, comme la statue du Commandeur…
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