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Critique de Biblioroz


Jeanne, libérée du couvent, a soif de bonheur.
En ce mois de mai, l'eau du ciel se déverse sur Rouen mais peu importe, elle désire rejoindre la campagne et la mer normandes, faire exploser sa liberté dans ce vieux château d'Yport.
La campagne dégoulinante et trempée n'entache en rien son exaltation. Elle va, pleine de la fougue de ses dix-sept ans, accomplir ses rêves peuplés de joies, de désir, de bonheur et d'amour à venir.
Cette vaste demeure qui l'attend, avec son admirable description, on la voit, on la sent. Ses tentures, ses vieux meubles sculptés, ses tapisseries de scènes légendaires, elles sont là, devant mes yeux éblouis et ravis par cette prégnance des lieux.
Un premier chapitre si riche, qui contient tant d'amour de l'environnement normand, arbres dressés ou tordus, senteurs mêlées de fleurs, d'herbes, et la côte de falaises avec ses joncs marins, ses effluves iodées. Ah, quel délice littéraire !
Griserie des lieux et de l'impatience de Jeanne à voler vers son destin de rêve, jusqu'à en défaillir de bonheur.

Dès les premières pages, je suis irrésistiblement séduite par cette écriture raffinée, par ces paysages en mouvement où nature et espoirs de Jeanne sont indissociables. Tous les sentiments de notre héroïne trouvent écho dans le décor environnant.

Et lorsque l'automne arrive, après son voyage de noces en Corse, la désolation de cette même nature lugubre se marie avec les désillusions cruelles de Jeanne. La froidure du temps s'allie à celle du coeur. Souffrance muette, résignation, le temps des larmes succède bien rapidement aux temps des rêves. Des rêves brisés, une vie piétinée.
L'infidélité de son mari cloue définitivement Jeanne dans une vie monotone, dans une léthargie maladive, dans une vie douloureuse dénuée de tout bonheur.

Cette magnifique plume envahissante dépeint avec émotion et férocité cette noblesse provinciale. Les portraits des deux prêtres avec leurs implications sacerdotales plus que douteuses font grincer des dents. Et la tante Lison dont la présence, pourtant précieuse, est complètement ignorée. Elle nous étreint le coeur par ce cruel et poignant manque d'attention et d'affection dont elle souffre en silence.

« Le vaste bâtiment grisâtre avait ce jour-là sur ses murs ternis des sourires de soleil. »
C'est beau non ?
Je ne comprends vraiment pas pourquoi les écrits de Maupassant ne m'attiraient pas. Mais ma joie d'avoir découvert aujourd'hui ce classique est immense. Je vais courir acheter Bel-Ami.
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